S.II. MISE EN OEUVRE DE LA LIBERTE

I. CHAMP D’APPLICATION : LA DISCRIMINATION A REBOURS

Un français, Pierrot, en a assez de voir des confrères étrangers comme Helmut et Waltraud, s’installer sur le territoire national pour ouvrir cabinets secondaires. Il ne bénéficie pas lui-même de cette possibilité. Il ne comprend pas cette situation. En vérité, il voit les choses simplement, soit il peut bénéficier d’un droit d’ouvrir un cabinet secondaire, soit le confrère étranger ne doit plus en bénéficier


A. Droit d’ouvrir pour les étrangers


CJCE 12 juillet 1984 C-107-83 ,Klopp Rec. p. 02971

CJCE, 30 avril 1986, C-96-85, Commission c/ France


B. Interdiction d’ouvrir pour les Français


II. L’ACCES AUX ACTIVITES ECONOMIQUES


A. Reconnaissance des qualifications résultant d’une harmonisation


1. Harmonisation réalisée


a) Sectorielles

Directive 93/16/CEE, JOCE L 165, 7 juill. 1993 et directive 1999/46/CE de la Commission du 21 mai 1999 modifiant la directive 93/16/CEE du Conseil visant à faciliter la libre circulation des médecins et la reconnaissance mutuelle de leurs diplômes, certificats et autres titres (Journal officiel n° L 139 du 02/06/1999 p. 0025 – 0026

Directive 98/5/CE visant à faciliter l’exercice permanent de la profession d’avocat dans un Etat membre autre que celui où la qualification a été acquise

Directive 77/249/CEE du 22 mars 1977, JOCE L 78, 26 mars 1977, tendant à faciliter l’exercice effectif de la libre prestation de services par les avocats


b) Générales

Directive 89/48/CEE du Conseil du 21 décembre 1988 relative à un système général de reconnaissance des diplômes d’enseignement supérieur qui sanctionnent des formations professionnelles d’une durée minimale de trois ans

Directive 92/51/CEE du Conseil du 18 juin 1992, qui complète la précédente en étendant son dispositif aux formations courtes, d’une durée inférieure à trois ans (v. ég. Directive 1999/42/CE).


2.Harmonisation en cours


B. Reconnaissance des qualifications hors harmonisation

CJCE 1er fév. 1996, C-164/94 , Aranitis / Land Berlin ( Rec._p._I-135) :

« Les articles 6, 48 et 52 du traité CE doivent être interprétés en ce sens que, quand les autorités compétentes d’un État membre sont saisies d’une demande d’autorisation d’exercer une profession à laquelle l’accès est, selon la législation nationale, subordonné à la possession d’un diplôme ou d’une qualification professionnelle, elles sont obligées de prendre en considération les diplômes, certificats et autres titres que l’intéressé a acquis dans le but d’exercer cette même profession dans un autre État membre en procédant à une comparaison entre les compétences attestées par ces diplômes et les connaissances et qualifications exigées par les règles nationales.

Il en va de même pour les activités professionnelles qui, quant à leurs conditions d’accès ou d’exercice, ne sont pas subordonnées par des dispositions juridiques à la possession d’un diplôme. Dans de telles circonstances, les autorités compétentes de l’État membre d’accueil qui sont chargées du classement des ressortissants d’autres États membres, lequel aura une influence sur la possibilité pour ces personnes de trouver du travail sur le territoire de l’État membre d’accueil, sont tenues de prendre en considération, lors de ce classement, les diplômes, connaissances, qualifications et autres titres que l’intéressé a acquis dans le but d’exercer une profession dans son État membre d’origine ou de provenance. »

CJCE 14 septembre 2000, C-238/98 , Hocsman (, Rec._p._I-6623) :

L’article 52 du traité (devenu, après modification, article 43 CE) doit être interprété en ce sens que, lorsque, dans une situation non régie par une directive relative à la reconnaissance mutuelle des diplômes, un ressortissant communautaire présente une demande d’autorisation d’exercer une profession dont l’accès est, selon la législation nationale, subordonné à la possession d’un diplôme ou d’une qualification professionnelle, ou encore à des périodes d’expérience pratique, les autorités compétentes de l’État membre concerné sont tenues de prendre en considération l’ensemble des diplômes, certificats et autres titres, ainsi que l’expérience pertinente de l’intéressé, en procédant à une comparaison entre, d’une part, les compétences attestées par ces titres et cette expérience, et, d’autre part, les connaissances et qualifications exigées par la législation nationale.

CJCE 22 janvier 2002, C-31/00 ,Dreessen ( Rec._p._I-663) :

L’article 43 CE doit être interprété en ce sens que, lorsqu’un ressortissant communautaire présente aux autorités compétentes d’un État membre une demande d’autorisation d’exercer une profession dont l’accès est, selon la législation nationale, subordonné à la possession d’un diplôme ou d’une qualification professionnelle, ou encore à des périodes d’expérience pratique, ces autorités sont tenues de prendre en considération l’ensemble des diplômes, certificats et autres titres, ainsi que l’expérience pertinente de l’intéressé, en procédant à une comparaison entre, d’une part, les compétences attestées par ces titres et cette expérience et, d’autre part, les connaissances et qualifications exigées par la législation nationale, même lorsqu’une directive relative à la reconnaissance mutuelle des diplômes a été adoptée pour la profession en cause, mais que l’application de cette directive ne permet pas d’aboutir à la reconnaissance automatique du ou des titres du demandeur. Il est sans importance, à cet égard, que l’intéressé, bien qu’il justifie d’un diplôme dans un domaine dans lequel a été adoptée une telle directive, ne puisse pas invoquer le mécanisme de reconnaissance automatique prévue par cette directive parce que son diplôme a été délivré dans un pays tiers ou parce que, pour d’autres raisons, les conditions d’application de ce mécanisme ne sont pas réunies.


C. Appréciation des qualifications


1. Appréciation des titres universitaires


CJCE, 28 avril 1977, C-71-76, Thieffry / Conseil de l’ordre des avocats de la Cour de Paris (, Rec._p._00765) :

Au regard de la distinction entre l’effet universitaire et l’effet civil de la reconnaissance d’équivalence de diplômes étrangers, il appartient aux autorités nationales compétentes de porter, compte tenu des exigences du droit communautaire en matière de liberté d’établissement, les appréciations de fait qui leur permettent de juger si une reconnaissance prononcée par une instance universitaire peut valoir, par delà son effet académique, en tant que titre d’habilitation professionnelle…

La circonstance qu’une législation nationale ne prévoit une reconnaissance d’équivalence qu’à des fins universitaires ne justifie pas, à elle seule, le refus de reconnaître une telle équivalence comme titre d’habilitation professionnelle. Il en est particulièrement ainsi lorsqu’un diplôme reconnu à des fins universitaires est complété par un certificat d’aptitude professionnelle obtenu selon la législation du pays d’établissement.



2. Preuve des titres et qualifications


CJCE 21 mars 2002, C-298/99 , Commission / Italie, (Rec._p._I-3129) :

L’exigence, posée de façon générale par un État membre, que la demande de reconnaissance d’un titre délivré dans un autre État membre soit accompagnée du diplôme original ou d’une copie certifiée conforme de ce diplôme constitue une entrave à la liberté d’établissement et à la libre prestation des services, consacrées par les articles 52 et 59 du traité (devenus, après modification, articles 43 CE et 49 CE), en ce qu’elle entraîne des obstacles supplémentaires pour tous les demandeurs, compte tenu des risques de perte du diplôme original ou du retard éventuellement pris par l’État membre d’origine pour délivrer ledit diplôme ainsi que des démarches et frais additionnels découlant des procédures de certification des copies conformes des titres originaux.

S’il est vrai que les États membres sont, pour des raisons impérieuses d’intérêt général, en droit d’exiger la preuve de l’existence d’un tel titre, ladite exigence apparaît disproportionnée en ce qu’elle exclut toute autre forme de preuve permettant d’établir avec le même degré de certitude l’existence du titre en question, telle que la présentation d’une attestation ou d’une reconnaissance du diplôme du demandeur par les autorités ou organisations professionnelles de l’État membre d’origine.

Dans le cadre de la reconnaissance d’un titre délivré dans un autre État membre, l’obligation posée par l’État membre d’accueil de présenter un certificat de nationalité et celle de fournir des traductions certifiées conformes de tous les documents relatifs à la demande de reconnaissance ne sauraient être qualifiées de nécessaires ni être justifiées par des raisons impérieuses d’intérêt général et apparaissent donc incompatibles avec l’article 52 du traité (devenu, après modification, article 43 CE).


3. Informations relatives aux qualifications requises


CJCE 7 mars 2002, C-145/99 , Commission / Italie ,(Rec._p._I-2235) :

L’article 1er, sous g), deuxième alinéa, de la directive 89/48, relative à un système général de reconnaissance des diplômes d’enseignement supérieur qui sanctionnent des formations professionnelles d’une durée minimale de trois ans, prévoit que, pour permettre l’organisation de l’épreuve d’aptitude, les autorités compétentes de l’État membre d’accueil « établissent une liste des matières qui, sur la base d’une comparaison entre la formation requise dans leur État et celle reçue par le demandeur, ne sont pas couvertes par le diplôme ou le ou les titres dont le demandeur fait état ».

S’il est vrai que cette disposition n’exige pas que les États membres réglementent en détail tous les aspects de l’épreuve d’aptitude, elle ne les exonère toutefois pas de l’obligation de préciser et de publier les matières considérées comme indispensables pour l’exercice de la profession concernée et les modalités de ladite épreuve d’aptitude, afin que les demandeurs puissent connaître, de manière générale, la nature et le contenu de l’épreuve à laquelle, le cas échéant, ils seront soumis.

En l’absence d’une telle réglementation, la mise en oeuvre, au cas par cas, de la comparaison prévue audit article risque d’être arbitraire, voire discriminatoire, et une législation nationale de ce type ne peut donc pas être considérée comme ayant transposé de manière complète la directive 89/4.