LIVRE I. LES CONFLITS DE JURIDICTIONS

TITRE I. LA COMPETENCE JUDICIAIRE INTERNATIONALE

CH. I. COMPETENCE DE DROIT COMMUN

S.I. PRINCIPE

L’extranéité des parties n’est pas une cause d’incompétence des juridictions françaises.

Cass. civ. 1re, 19 octobre 1959, D. 1960. 37

Cass. civ. 21 juin 1948, Patino, rev. Crit. Dip 1949.557

Civ.1re, 30 oct. 1962, Scheffel, D. 63.109

l’article 14 du code civil qui donne compétence à la juridiction française en raison de la nationalité française du demandeur n’a lieu de s’appliquer que lorsqu’aucun critère de compétence territoriale n’est réalisé en France. (Civ. 1re, 19 nov. 1985,Bull. civ. I, n° 306; GA, n° 71, rev. Crit. 86, 712)

S. II. DIFFICULTÉS DE MISE EN OEUVRE DU PRINCIPE

I. Successions

Art. 45 CPC :

« En matière de succession, sont portées devant la juridiction dans le ressort de laquelle est ouverte la succession jusqu’au partage inclusivement :

– les demandes entre héritiers ;

– les demandes formées par les créanciers du défunt ;

– les demandes relatives à l’exécution des dispositions à cause de mort. »

Civ. 1re, 7 mars 2000, n° 96-22.366

Civ. 1re, 23 juin 2010, Bull. civ. I, n° 140, (Sem. jur. éd. not et imm., n° 140, 2010.1308, note A. Devers) :

« Ayant retenu que les juridictions françaises étaient compétentes pour connaître partiellement des opérations de liquidation et partage de la succession, tant mobilière en vertu de l’article 14 du code civil, qu’immobilière en raison de la situation d’un immeuble en France, une cour d’appel qui constate que la loi applicable aux dites opérations relatives aux meubles et à l’immeuble situés en Espagne, renvoyait à la loi française, loi nationale du défunt, en déduit exactement que les juridictions françaises étaient, par l’effet de ce renvoi, compétentes pour régler l’ensemble de la succession à l’exception des opérations juridiques et matérielles découlant de la loi réelle de situation de l’immeuble en Espagne »

II. Litispendance

Civ.1re, 26 novembre 1974, Rev. Crit. Dip 1975.491

« L’exception de litispendance peut cependant être reçue devant le juge français, en vertu du droit commun français, en raison d’une instance engagée devant un tribunal étranger également compétent, mais ne saurait être accueillie lorsque la décision a intervenir a l’étranger n’est pas susceptible d’être reconnue en France. »

Civ. 1re, 23 février 2011, n° 10-1410, Bull. civ. I, n° 33 :

« Mais attendu que l’exception de litispendance en raison d’une instance engagée devant un tribunal étranger également compétent ne peut être accueillie si la décision à intervenir n’est pas susceptible d’être reconnue en France ; que la cour d’appel ayant relevé que la procédure intentée au Liban par le mari était une répudiation unilatérale, et que l’épouse n’avait eu qu’un délai de quinze jours entre la requête et la première audience, alors qu’elle résidait en France, en a justement déduit que la décision à intervenir qui heurtait des principes d’égalité entre époux et de respect des droits de la défense ne pourrait pas être reconnue en France de sorte que l’exception de litispendance internationale ne pouvait qu’être écartée ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ».

III. Connexité

Civ. 1re, 20 oct. 1987,bull. Civ. I, n°275,  rev. Crit. Dip 1988, 540

Civ. 1re, 22 juin 1999,Bull. civ. I, n° 208; rev. crit. 2000.42, note Cuniberti  

La cour d’appel qui relève souverainement que le litige qui lui est soumis, qui ne relève pas de la compétence exclusive des tribunaux français, commande d’apprécier la validité d’une saisie pratiquée à l’île Maurice et dont la juridiction de ce pays doit connaître, de sorte qu’il existe du fait de cette connexité, un risque de contrariété de décisions, justifie légalement sa décision de dessaisissement de la juridiction française au profit de celle de l’île Maurice, également compétente.

Cass. civ. 9 avril 1935, rev. Crit. Dip 36.680

IV. Clauses dérogatoires à la compétence des tribunaux français

1. Clauses attributives de compétence.

L’article 48 du code de procédure civile dispose :

« Toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite à moins qu’elle n’ait été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant et qu’elle n’ait été spécifiée de façon très apparente dans l’engagement de la partie à qui elle est opposée ».

Civ. 1re, 17 déc. 1985, rev. Crit. 1986.537 : les clauses prorogeant la compétence internationale sont en principe licites lorsqu’elles ne font pas échec à la compétence territoriale impérative d’une juridiction française et sont invoquées dans un litige de caractère international.

Il a été jugé qu’ « une clause attributive de compétence incluse dans un contrat de travail international ne peut faire échec aux dispositions impératives de l’article R. 1412-1 du code du travail applicables dans l’ordre international ». (soc. 29 sept. 2010, Bull. civ. V, n°204).

2. Clauses compromissoires et compromis

Sauf disposition législative contraire, la clause compromissoire est valable dans les contrats conclus à raison d’une activité professionnelle (v. art. 2061 cciv.).

Civ. 1re, 4 juill. 1972, rev. Crit. Dip 1974.82

 

V. L’incompétence

L’article 76 al. 2 CPC dispose que devant la Cour d’appel et la Cour de cassation, l’incompétence d’attribution peut être relevée d’office si l’affaire relève de la compétence d’une juridiction répressive ou administrative ou échappe à la compétence de la juridiction française.

Devant les juridictions de première instance, l’article 76 al. 1 s’applique.

Par ailleurs, lorsqu’une exception d’incompétence a été soulevée, le juge peut se déclarer incompétent et déclarer les parties à mieux se pourvoir. Il ne peut  pas désigner la juridiction étrangère compétente (CPC, art. 81).

L’exception d’incompétence doit être soulevée simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir (CPC, art. 74 al. 1).

L’exception d’incompétence doit, conformément à l’article 75 CPC, être motivée et elle doit désigner la juridiction devant laquelle la demande doit être portée.  Il a été jugé que cette obligation s’impose même dans le cas où la juridiction saisie n’a pas le droit de désigner la juridiction compétente (Paris, 4 fév. 1964, D. 1964.597, note Bruliard).

La Cour de cassation fait application de ce texte en matière internationale mais se contente d’une désignation globale des tribunaux du pays étranger (cass. Civ. 17 déc. 1985, D. 86. IR 265).

Soc., 17 mars 1998 (Bull. civ. I, n° 151,p. 112; JCP 1998.II. 10127, note Kerckove) :

 « Attendu qu’il résulte de ce texte que lorsque, à l’occasion d’une exception d’incompétence, il est prétendu qu’une juridiction étrangère est compétente, il suffit au défendeur de préciser l’Etat dans lequel se trouve la juridiction compétente, sans avoir à préciser ni sa nature ni sa localisation exacte; »

V. ég. Com. 25 nov. 1997, n° 95-21.021, Bull.civ.IV, n° 310

 

 

CH. II. COMPÉTENCE FONDÉE SUR LA NATIONALITÉ

L’article 14 dispose : « L’étranger, même non résidant en France, pourra être cité devant les tribunaux français, pour l’exécution des obligations par lui contractées en France avec un Français ; il pourra être traduit devant les tribunaux de France, pour les obligations par lui contractées en pays étranger envers des Français. »

Tandis que l’article 15 dispose : « Un Français pourra être traduit devant un tribunal de France, pour des obligations par lui contractées en pays étranger, même avec un étranger. « 

S. I. CONDITIONS D’APPLICATION

I. QUANT À L’OBJET DU LITIGE

Civ. 1re 17 nov. 1981, Bull. Civ. II, n° 341; J.C.P. 1982,éd.  N. 19920, note Boulanger.

« Les articles 14 et 15 du code civil qui permettent au plaideur français d’attraire un étranger devant les juridictions françaises et au plaideur français ou étranger d’y attraire un Français, ont une portée générale s’étendant à toutes matières, à la seule exclusion des actions réelles immobilières et des demandes en partage portant sur des immeubles situés à l’étranger, ainsi que des demandes relatives à des voies d’exécution pratiquées hors de France, et s’applique notamment à tous litiges nés de successions mobilières, où qu’elles se soient ouvertes et quelle que soit la loi qui les régit. »

II. QUANT AUX PERSONNES CONCERNÉES

Civ. 1re, 21 mars 1966, D. 66. 429

Civ. 1re, 31 janv. 1995, Bull. Civ. I, n° 56; D. 95, 471, note P. Courbe; rtdciv. 1996. 162.

« Attendu que M. Martabano, ressortissant américain domicilié aux Etats-Unis, a commandé à la société Couach Inc., ayant son siège dans l’Etat de Floride, un bateau de plaisance à construire dans les chantiers de la société française Guy Couach Plascoa ; qu’une retenue de garantie avait été constituée entre les mains de M. Katzin ; que la société Guy Couach Plascoa, exerçant les droits de sa débitrice, la société Couach Inc. alors en liquidation, a assigné devant le tribunal de grande instance de Bordeaux, en paiement du solde du prix de vente représenté par la retenue de garantie, MM. Martabano et Katzin ainsi que le liquidateur de la société américaine ; qu’elle a, également, attrait son assureur, la compagnie Navigation et Transports, pour le cas où elle serait jugée tenue de la garantie des vices affectant le bateau ;

Sur le premier moyen, pris en sa cinquième branche :

Vu l’article 14 du Code civil ;

Attendu que la compétence internationale des tribunaux français résultant de l’article 14 du Code civil est fondée, non sur les droits nés des actes ou faits litigieux, mais sur la nationalité française du demandeur à l’instance ;

Attendu que l’arrêt attaqué a fait droit à l’exception d’incompétence de la juridiction française soulevée par M. Martabano par le motif que les parties au contrat étaient de nationalité américaine et que tant le lieu du contrat que celui de la livraison étaient aux Etats-Unis ; en quoi, la cour d’appel a violé le texte susvisé, le demandeur étant de nationalité française ; »

Civ. 1re, 7 avr. 1998, rev. Crit. 1998, 459

« Sur les deux moyens réunis et pris en leurs diverses branches :

Attendu que la société française Bachy, déclarant agir en qualité de mandataire du groupement d’entreprises Bachy-Soletanche, ayant son siège à Monaco, fait grief à l’arrêt attaqué (Paris, 15 décembre 1995) d’avoir déclaré incompétent le juge des référés de Paris pour statuer sur une demande d’expertise concernant un marché de travaux exécutés en Principauté de Monaco;

qu’il est reproché à la cour d’appel d’avoir méconnu l’article 14 du Code civil et les règles de compétence territoriale internes ;

Mais attendu que la société Bachy agissait en qualité de mandataire d’un groupement de sociétés ayant son siège en Principauté de Monaco, auquel cas les dispositions de l’article 14 du Code civil ne pouvaient s’appliquer ;

Et attendu que la cour d’appel a constaté que le siège social du défendeur était situé à Monaco, lieu d’exécution de la prestation litigieuse ;

Que l’arrêt attaqué est légalement justifié ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; »

Civ. 1re, 14 décembre 2004, n° 01-03.285, Bull. civ. I, n° 311

S.II. PORTÉE DE CETTE COMPÉTENCE

I. MISE EN OEUVRE DES ARTICLES 14 ET 15

Civ. 1re, 22 mai 2007, n° 04-14.716, Bull. civ. I, n° 195

A. Initiative des privilégiés

Civ. 1re, 7 juill. 1981, Bull. Civ. I, n° 252

Civ. 1re, 19 juill. 1989, Bull. Civ. I, n° 296

Civ. 1re, 19 nov. 1985, Bull. Civ. I, n° 306; D. 86. 362, note J. Prévault; JCP 1987 II, n° 20810, note P. Courbe; Rev. Crit. 1986, 713, note Y. Lequette

Civ. 1re, 13 juin 1978, Bull. Civ. I, n° 223

Civ. 1re, 16 avr. 1985, Bull. Civ. I, n° 114

B. Renonciation des privilégiés

Civ. 1re, 2 oct. 2001, bull. Civ. I, n° 235

Civ. 1re, 17 déc. 1985, Bull. Civ. I, n° 354

Ch. mixte 28 juin 1974, bull. Civ. N° 4

Civ. 1re, 16 juin 1981 : Bullciv 1 N. 216

Civ 1re, 3 décembre 2008, n°07-19.657, Publié au bulletin

II. APPLICATION LIMITÉE PAR DES CONVENTIONS INTERNATIONALES.

Civ. 1re, 2 oct. 2001, Bull. Civ. I, n° 235,

Civ. 1re, 2 mars 1999, Bull. Civ. I, n° 73; JCP 1999, p. 2258, note G. Cuniberti

Article 3-2 Règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale


Voir également les arrêts de la séance de travaux dirigés n°3


 

CH.III.COMPETENCE RESULTANT DE REGLES SUPRANATIONALES ET DE CONVENTIONS INTERNATIONALES

S.I. RÈGLES GÉNÉRALES DE COMPÉTENCE

Règlement R. 1212/2012 du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale est entré en vigueur le 10 janvier 2013.

Applicable le 10 janvier 2015 (art. 81), il a remplacé le Règlement 44/2001 du 22 décembre 2000.

 

Article 67

Le présent règlement ne préjuge pas de l’application des dispositions qui, dans des matières particulières, règlent la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions et qui sont contenues dans les actes communautaires ou dans les législations nationales harmonisées en exécution de ces actes.

 

Article 71

1. Le présent règlement n’affecte pas les conventions auxquelles les États membres sont parties et qui, dans des matières particulières, règlent la compétence judiciaire, la reconnaissance ou l’exécution des décisions.

 

2. En vue d’assurer son interprétation uniforme, le paragraphe 1 est appliqué de la manière suivante:

 

a) le présent règlement ne fait pas obstacle à ce qu’un tribunal d’un État membre, partie à une convention relative à une matière particulière, puisse fonder sa compétence sur une telle convention, même si le défendeur est domicilié sur le territoire d’un État membre non partie à une telle convention. Le tribunal saisi applique, en tout cas, l’article 26 du présent règlement;

 

b) les décisions rendues dans un État membre par un tribunal ayant fondé sa compétence sur une convention relative à une matière particulière sont reconnues et exécutées dans les autres États membres conformément au présent règlement.

Si une convention relative à une matière particulière et à laquelle sont parties l’État membre d’origine et l’État membre requis détermine les conditions de reconnaissance et d’exécution des décisions, il est fait application de ces conditions. Il peut, en tout cas, être fait application des dispositions du présent règlement qui concernent la procédure relative à la reconnaissance et à l’exécution des décisions.

 

Le Règlement s’applique en matière civile et commerciale, quelle que soit la nature de la juridiction (art. 1 § 1). Toutefois certaines matières sont exclues de son application. Il en va ainsi de l’état et la capacité des personnes physiques, les régimes matrimoniaux, les testaments et les successions, des faillites, concordats et autres procédures analogues, de la sécurité sociale, de l’arbitrage (§ 2).

 

Enfin, il ne recouvre notamment pas les matières fiscales, douanières ou administratives (§ 1).

 

CJCE, 1er mars 2005, Owusu, C-281/02, Rec., p.1383

 

L’article 2 de la convention du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, telle que modifiée par la convention du 9 octobre 1978 relative à l’adhésion du royaume de Danemark, de l’Irlande et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, par la convention du 25 octobre 1982 relative à l’adhésion de la République hellénique et par la convention du 26 mai 1989 relative à l’adhésion du royaume d’Espagne et de la République portugaise, s’applique dans le cadre d’un litige opposant devant les juridictions d’un État contractant des parties domiciliées sur le territoire de cet État et présentant certains liens de rattachement avec un État tiers, mais non avec un autre État contractant, pareille situation couvrant ainsi les rapports entre les juridictions d’un seul État contractant et celles d’un État non contractant et non les rapports entre les juridictions de plusieurs États contractants.

 

En effet, si l’application même des règles de compétence de la convention requiert certes l’existence d’un élément d’extranéité, le caractère international du rapport juridique en cause ne doit toutefois pas nécessairement découler, pour les besoins de l’application de ladite disposition, de l’implication, en raison du fond du litige ou du domicile respectif des parties au litige, de plusieurs États contractants. L’implication d’un État contractant et d’un État tiers, en raison, par exemple, du domicile du demandeur et d’un défendeur dans le premier État et de la localisation des faits litigieux dans le second, est également susceptible de conférer un caractère international au rapport juridique en cause.

 

Par ailleurs, la désignation comme compétente de la juridiction d’un État contractant en raison du domicile du défendeur sur le territoire de cet État, même à propos d’un litige qui se rattache, au moins en partie, en raison de son objet ou du domicile du demandeur, à un État tiers, n’est pas de nature à faire peser une obligation sur ce dernier État, de sorte que le principe de l’effet relatif des traités n’est pas affecté.

 

CJUE, 17 novembre 2011, C‑327/10, Hypoteční banka a.s. contre Udo Mike Lindner.

 

Faits et question préjudicielle :

 

Un contrat de crédit immobilier est conclu par un consommateur ayant la nationalité d’un État membre auprès d’une banque établie dans un autre État membre. Le prêt n’est pas remboursé et la banque agit contre l’emprunteur. Par son recours, introduit le 16 septembre 2008 devant la juridiction de renvoi, Hypoteční banka, une société de droit tchèque ayant son siège à Prague (République tchèque), tend à obtenir la condamnation de M. Lindner, ressortissant allemand, à lui payer une somme de 4 383 584, 60 CZK, augmentée des intérêts de retard, à titre d’arriérés d’un crédit hypothécaire octroyé à ce dernier en exécution d’un contrat conclu entre les parties le 19 août 2005.

 

La question posée à la Cour est la suivante :  le règlement n° 44/2001 doit-il  être interprété en ce sens que les conditions d’application des règles de compétence établies par celui-ci sont remplies lorsque l’une des parties à la procédure juridictionnelle est un ressortissant d’un État membre autre que celui dans lequel se déroule cette procédure. »

 

Réponse de la Cour :

 

1. La Cour affirme tout d’abord que «  l’application des règles de compétence dudit règlement requiert l’existence d’un élément d’extranéité ». (point 29)

2. Elle rappelle l’arrête Owusu dans lequel elle a dit que le caractère international d’un rapport juridique peut découler de la circonstance que la situation en cause dans un litige est de nature à soulever des questions relatives à la détermination de la compétence des juridictions dans l’ordre international (arrêt du 1er mars 2005, Owusu, C-281/02, Rec. p. I‑1383, point 26).

3. Elle observe que la nationalité étrangère d’une partie au litige n’est pas prise en compte par les règles de compétence établies par le règlement n° 44/2001.

4. Mais elle considère qu’il « convient d’opérer une distinction entre, d’une part, la question de savoir à quelles conditions les règles de compétence de ce règlement doivent s’appliquer et, d’autre part, celle de savoir selon quels critères la compétence internationale est régie en application de ces règles ».

5. Elle décide que, dans une situation telle que celle au principal, dans laquelle le défendeur est de nationalité étrangère et n’a pas de domicile connu dans l’État sur le territoire duquel se trouve la juridiction saisie de l’action, les règles de compétence du règlement n° 44/2001 sont susceptibles de s’appliquer.

 

La Cour suit ainsi les conclusions de l’avocat général.

 

« 59.      D’après la jurisprudence de la Cour (10), qui concernait certes les règles de compétence de la convention de Bruxelles, mais qui est transposable au règlement n° 44/2001 (11), une application de ces règles suppose un lien d’extranéité (12). Pour qu’un tel élément d’extranéité existe, il suffit qu’un tribunal d’un État membre soulève des questions relatives à sa compétence internationale (13).

 

60.      Une affaire telle que celle de l’espèce soulève de telles questions.

 

61.      En effet, de telles questions peuvent se poser non seulement lorsque d’autres États sont impliqués en raison du domicile des parties, de l’objet du litige ou du lieu de l’événement litigieux. Le fait que le défendeur au principal est un ressortissant d’un autre État membre (14) ou que son domicile n’est pas connu de la juridiction de renvoi est également susceptible de soulever de telles questions relatives à la compétence internationale d’un tribunal.

 

62.      En outre, l’objet et la finalité de l’article 16, paragraphe 2, du règlement n° 44/2001, qu’il convient de prendre en considération dans un cas comme celui de l’espèce, militent en faveur de l’application des règles de compétence du règlement dans un cas comme celui de l’espèce. D’après ces règles, un consommateur ne peut être attrait en principe que devant les juridictions de l’État de son domicile. Si ces dispositions devaient rester inappliquées dans un cas comme celui de l’espèce, dans lequel le tribunal national a uniquement constaté que le défendeur n’avait pas de domicile dans son État membre, il y aurait un risque pour qu’un défendeur soit attrait devant un tribunal de cet État membre, bien qu’il soit éventuellement domicilié dans un autre État membre. Cela irait à l’encontre de l’objectif de protection de l’article 16, paragraphe 2, du règlement.

 

63.      À l’encontre de l’applicabilité des règles de compétence du règlement n° 44/2001 dans un cas comme celui de l’espèce, le gouvernement hongrois oppose, en premier lieu, le fait que, d’après l’article 2, paragraphe 2, du règlement, les mêmes règles doivent s’appliquer aux étrangers et aux nationaux qui ont leur domicile dans le même État membre. Deuxièmement, le gouvernement néerlandais fait valoir que les règles relatives à la compétence internationale, prévues par le règlement, se rattachent en principe au domicile, mais qu’en revanche elles ne tiennent pas compte de la nationalité.

 

64.      Ces objections ne sauraient convaincre.

 

65.      En effet, il convient d’opérer une distinction entre la question de savoir à quelles conditions les règles de compétence du règlement n° 44/2001 doivent s’appliquer, d’une part, et la question de savoir selon quels critères la compétence internationale est régie en application de ces règles, d’autre part. Les dispositions invoquées par ces gouvernements contiennent les critères régissant la compétence internationale, pour autant que les règles de compétence du règlement soient applicables. En revanche, on ne saurait déduire de ces critères quand les règles de compétence du règlement trouvent à s’appliquer. »

 

Il demeure que ces règles s’appliquent en principe lorsque le défendeur est domicilié dans l’un des Etats membres.

 

Le règlement prime les règles nationales. La Cour de justice,  dans l’arrêt Costa rendu le 15 juillet 1964 (aff. 6/64; Rec. 1141), a affirmé le principe de primauté du droit communautaire.

 

Le droit communautaire prime toutes les normes internes, notamment le droit constitutionnel des Etats membres (CJCE, 17 déc 1970, aff. 11/70, Internationale Handelsgesellschaft, rec. CJCE p. 1125) ainsi que les conventions internationales conclues par les Etats membres après le 1er janvier 1958 ou avant leur adhésion ( CJCE 5 nov. 2002, C-466/98, Commission c/ Grande-Bretagne : Rec. CJCE, I, 9427).

 

Par ailleurs, selon l’article 249 § 2 CE :

 

“ Le règlement a une portée générale. Il est obligatoire dans tous ses éléments et il est directement applicable dans tout Etat membre.”

 

 

I. DÉTERMINATION DE LA COMPÉTENCE TERRITORIALE

 

A. Compétence générale
L’article 4 §1 dispose que “les personnes domiciliées sur le territoire d’un Etat membre sont attraites, quelle que soit leur nationalité, devant les juridictions de cet Etat membre”.

 

La condition de domicile est remplie dès lors que, selon la conception du domicile adoptée par l’un des Etats membres, le défendeur est  considéré comme domicilié dans cet Etat (art. 59 du Règlement).

 

Article 62
« 1. Pour déterminer si une partie a un domicile sur le territoire de l’État membre dont les juridictions sont saisies, le juge applique sa loi interne.
2. Lorsqu’une partie n’a pas de domicile dans l’État membre dont les juridictions sont saisies, le juge, pour déterminer si elle a un domicile dans un autre État membre, applique la loi de cet État membre. »

En ce qui concerne les personnes morales, leur siège est assimilé à leur domicile. Le règlement  le définit dans son article 63.

 

Article 60
1. Pour l’application du présent règlement, les sociétés et les personnes morales sont domiciliées là où est situé:
a) leur siège statutaire;
b) leur administration centrale, ou
c) leur principal établissement.
2.   Pour l’Irlande, Chypre et le Royaume-Uni, on entend par «siège statutaire» le registered office ou, s’il n’existe nulle part de registered office, le place of incorporation (le lieu d’acquisition de la personnalité morale) ou, s’il n’existe nulle part de lieu d’acquisition de la personnalité morale, le lieu selon la loi duquel la formation (la constitution) a été effectuée.

3.   Pour déterminer si un trust a son domicile sur le territoire d’un État membre dont les juridictions sont saisies, le juge applique les règles de son droit international privé.

Par ailleurs, afin d’éviter toute difficulté résultant de l’application de privilèges de juridiction, L’article 5 § 2 exclut expressément l’application de règles de compétence nationale allant à l’encontre de ce principe, ce qui pour la France, vise les articles 14 et 15 du code civil.

 

D’un autre côté, l’article 4§2 précise que “les  personnes qui ne possèdent pas la nationalité de l’État  membre dans lequel elles sont domiciliées y sont soumises aux règles de compétence applicables aux nationaux”.

 

Article 6

1.   Si le défendeur n’est pas domicilié sur le territoire d’un État membre, la compétence est, dans chaque État membre, réglée par la loi de cet État membre, sous réserve de l’application de l’article 18, paragraphe 1, de l’article 21, paragraphe 2, et des articles 24 et 25.

2.   Toute personne, quelle que soit sa nationalité, qui est domiciliée sur le territoire d’un État membre, peut, comme les ressortissants de cet État membre, invoquer dans cet État membre contre ce défendeur les règles de compétence qui y sont en vigueur et notamment celles que les États membres doivent notifier à la Commission en vertu de l’article 76, paragraphe 1, point a).

 

La compétence générale ainsi définie  cède  devant l’application de compétences particulières (art. 5 § 1).

 

Article 5

1.   Les personnes domiciliées sur le territoire d’un État membre ne peuvent être attraites devant les juridictions d’un autre État membre qu’en vertu des règles énoncées aux sections 2 à 7 du présent chapitre.

 

 

B. Compétences particulières
 

 

1. Règles de compétence spéciales

 

 

a) Compétence fondée sur l’objet du litige

 

Le demandeur peut  se fonder sur ces règles pour assigner le défendeur devant un  tribunal d’un autre Etat membre que celui de son domicile.

Ces règles comme une exception par rapport à la compétence de principe de sorte que leur interprétation doit être restrictive (CJCE, 27 sept. 1988, aff. 189/87, Kalfelis, rec. CJCE p. 5579).

 

 

En matière contractuelle

 

L’article 7 1° est divisé en trois points. Le premier concerne les contrats en général (7 1° a). Le second  porte sur les contrats de vente et de service (7 1° b).

Le dernier (art. 7 1° c) précise que le point a) s’applique si le point b) ne s’applique pas.

 

L’article 7-1 a) prévoit qu’une personne  domiciliée sur le territoire d’un État membre peut être attraite devant le tribunal du lieu d’exécution de l’obligation qui sert de base à la demande.

 

@  Qu’est-ce que la matière contractuelle ? On observe généralement que la Cour de justice y voit une notion autonome qu’il faut interpréter en se référant principalement au système et aux objectifs de la convention, en vue d’assurer l’application uniforme de celle-ci dans tous les États membres.  (CJCE 17 juin 1992, Handte, C‑26/91, Rec. p. I-3967 ; CJCE, 5 février 2004, Frahuil, C‑265/02, Rec. p. I-1543, point 22 ; CJUE, 17 octobre 2013, C‑519/12,OTP Bank Nyilvánosan Működő Részvénytársaság contre Hochtief Solution AG).

 

F  Reste  à définir la notion.

Selon la Cour de justice un lien contractuel librement assumé doit être établi entre les parties au contrat (CJCE 17 juin 1992, Handte, C-26/91, Rec. p. I‑3967).

 

La notion de «matière contractuelle» ne saurait être comprise comme visant une situation dans laquelle il n’existe aucun engagement librement assumé d’une partie envers une autre.  Il faut donc identifier une obligation librement consentie (CJUE, 14 mars 2013 , C‑419/11, Česká spořitelna a.s. contre Gerald Feichter). Il en va ainsi de l’avaliste qui « en apposant sa signature au recto du billet à ordre, sous la mention «bon pour aval», a volontairement accepté d’agir comme garant des obligations du souscripteur dudit billet à ordre. Son obligation de garantir lesdites obligations a été ainsi, par sa signature, librement acceptée, au sens de ladite disposition » (Ibid). Selon la Cour : « Il s’ensuit que la relation juridique entre le bénéficiaire et l’avaliste d’un billet à ordre, établi de manière incomplète et complété ultérieurement, relève de la notion de «matière contractuelle», au sens de l’article 5, point 1, sous a), du règlement n° 44/2001 ».

 

CJUE, 17 octobre 2013, C‑519/12,OTP Bank Nyilvánosan Működő Részvénytársaság contre Hochtief Solution AG)

 

CJUE, 15 juin 2017, Saale Kareda c/ Stefan Benkö, C249/16.

 

CJUE, 4 octobre 2018, C‑337/17, Feniks sp. z o.o. contre Azteca Products & Services SL,

 

CJUE, 5 décembre 2019, C‑421/18,Ordre des avocats du barreau de Dinant contre JN

 

« 22. À titre liminaire, il y a lieu de relever que, si certains litiges opposant une autorité publique à une personne de droit privé peuvent relever du champ d’application du règlement n° 1215/2012, il en est autrement lorsque l’autorité publique agit dans l’exercice de la puissance publique (arrêts du 11 avril 2013, Sapir e.a., C‑645/11, EU:C:2013:228, point 33, et du 15 novembre 2018, Kuhn, C‑308/17, EU:C:2018:911, point 34). En effet, la manifestation de prérogatives de puissance publique par l’une des parties au litige, en raison de l’exercice par celle-ci de pouvoirs exorbitants par rapport aux règles applicables dans les relations entre particuliers, exclut un tel litige de la « matière civile et commerciale », au sens de l’article 1er, paragraphe 1, de ce règlement (arrêt du 28 février 2019, Gradbeništvo Korana, C‑579/17, EU:C:2019:162, point 49).

25      Concernant la règle de compétence spéciale prévue en matière contractuelle à l’article 7, point 1, sous a), du règlement n° 1215/2012, il y a lieu de rappeler également que la conclusion d’un contrat ne constitue pas une condition d’application de cette disposition (arrêt du 8 mai 2019, Kerr, C‑25/18, EU:C:2019:376, point 23 et jurisprudence citée).

26      Cependant, l’identification d’une obligation est néanmoins indispensable à l’application de ladite disposition, étant donné que la compétence juridictionnelle en vertu de celle-ci est établie en fonction du lieu où l’obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée. Ainsi, l’application de cette règle présuppose la détermination d’une obligation juridique librement consentie par une personne à l’égard d’une autre et sur laquelle se fonde l’action du demandeur (arrêt du 8 mai 2019, Kerr, C‑25/18, EU:C:2019:376, points 24 et 25 ainsi que jurisprudence citée).

29      Une telle situation doit être distinguée de celle qui était en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 8 mai 2019, Kerr (C‑25/18, EU:C:2019:376), par lequel, s’agissant d’une obligation des copropriétaires à l’égard de la copropriété, portant sur le paiement des contributions financières annuelles au budget de la copropriété au titre de l’entretien des parties communes d’un immeuble à appartements, la Cour a jugé que, même si la participation à une copropriété est requise par la loi, il n’en demeure pas moins que les détails de l’administration des parties communes de l’immeuble concerné sont, le cas échéant, réglés par contrat et que l’entrée dans la copropriété se fait par un acte d’acquisition volontaire conjointe d’un appartement et de parts de copropriété dans ces parties communes, de telle sorte qu’une telle obligation doit être considérée comme étant une obligation juridique librement consentie (arrêt du 8 mai 2019, Kerr, C‑25/18, EU:C:2019:376, point 27).

33      Toutefois, il ne peut être exclu que, outre les relations imposées par la loi, un ordre d’avocats établisse également avec ses membres des relations de nature contractuelle. Ainsi, dans la mesure où ces cotisations constitueraient la contrepartie de prestations librement consenties, notamment d’assurance, que cet ordre aurait négociées auprès d’un tiers afin d’obtenir des conditions plus avantageuses pour les avocats membres dudit ordre, l’obligation d’acquitter lesdites cotisations aurait un caractère contractuel et, partant, une action engagée en vue d’obtenir l’exécution de cette obligation relèverait du champ d’application de l’article 7, point 1, sous a), du règlement n° 1215/2012. Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier que tel est le cas dans le litige au principal. »

 

 

@  Qu’est-ce que l’obligation qui sert de base à  la demande ?

 

Ê  Tout d’abord, la notion d’«obligation», figurant à l’article 5, point 1, sous a), du règlement nº 44/2001, renvoie à l’obligation qui découle du contrat et dont l’inexécution est invoquée pour justifier l’action en justice (CJCE,  6 octobre 1976, De Bloos, 14/76, Rec. p. 1497, point 13; 15 janvier 1987, Shenavai, 266/85, Rec. p. 239, point 9 ; 19 février 2002, Besix, C-256/00, Rec. p. I-1699, point 44).

 

Ê  La CJCE a considéré que si deux obligations équivalentes doivent être exécutées dans deux Etats différents, un seul juge ne peut en connaître (CJCE 5 oct. 1999, Rec. CJCE I, p. 6747). Il n’en irait autrement qu’en admettant la possibilité de retenir la compétence  en fonction d’une obligation principale ( CJCE 15 janv. 1987, rev. Crit. 1987. 793 ; CJCE, 5 octobre 1999, Leathertex (C-420/97, Rec._p._I-6747).

 

Les parties ne sauraient fixer, « dans le seul but de déterminer un for compétent, un lieu d’exécution ne présentant aucun lien effectif avec la réalité de la relation contractuelle et où les obligations découlant de cette relation ne pourraient pas être exécutées suivant les termes de celui-ci » (CJCE, 20 février 1997, MSG, C-106/95, point 31). Ainsi, la CJUE a admis que lorsque le lieu d’exécution de l’obligation en cause au principal est expressément indiqué sur un billet à ordre, la juridiction de renvoi est tenue, dans la mesure où le droit applicable permet ce choix de lieu d’exécution de l’obligation, de prendre en compte ledit lieu afin de déterminer la juridiction compétente » (CJUE, 14 mars 2013 , C‑419/11, Česká spořitelna a.s. contre Gerald Feichter).

 

L’article 7-1°b) dispose que « le lieu d’exécution de l’obligation qui sert de base à la demande est :

–  pour la vente de marchandises, du lieu d’un État membre où, en vertu du contrat, les marchandises ont été ou auraient dû être livrées.

– Pour la fourniture de services, il s’agit du lieu d’un État membre où, en vertu du contrat, les services ont été ou auraient dû être fournis. ».

 

@  La Cour de justice considère que ce texte confère aux parties au contrat une autonomie de volonté. Elles sont libres de déterminer le lieu de livraison des marchandises (v. Point 45, Car Trim GmbH contre KeySafety Systems Srl, 25 fév. 2010, C-381/08) ou encore le lieu de fourniture des services.

 

@  La Cour de justice a considéré que les notions de vente et de prestation de service sont des notions autonomes (CJCE, 3 mai 2007 Affaire C-386/05, Color Drack GmbH contre Lexx International Vertriebs GmbH ; Rehder, 9 juill. 2009, C-204/08 Peter Rehder contre Air Baltic Corporation,point 33).

 

Vente ou Prestation de services

 

La Cour de justice considère qu’un contrat dont l’obligation caractéristique est la livraison d’un bien doit être qualifié de «vente de marchandises» au sens de l’article 5, point 1, sous b) (CJCE, Car Trim,précité). En ce qui concerne la notion de services, la Cour considère qu’elle « implique, pour le moins, que la partie qui les fournit effectue une activité déterminée en contrepartie d’une rémunération”(CJCE, 23 avril 2009, Falco Privatstiftung et Rabitsch, C‑533/07, Rec. p. I‑3327, point 29). Le “contrat par lequel le titulaire d’un droit de propriété intellectuelle concède à son cocontractant le droit de l’exploiter en contrepartie du versement d’une rémunération n’implique pas une telle activité”, car “par un tel contrat, le titulaire du droit concédé s’oblige, à l’égard de son cocontractant, uniquement à ne pas contester l’exploitation de ce droit par ce dernier“. le titulaire du droit de propriété intellectuelle n’accomplit aucune prestation en en concédant l’exploitation et s’engage seulement à laisser son cocontractant exploiter librement ledit droit” ( CJCE , 23 avril 2009, Falco Privatstiftung et Rabitsch, C‑533/07, Rec. p. I‑3327).

La CJUE a  jugé que le contrat de concession est un contrat de prestation de services (CJUE, 19 décembre 2013, C-9/12,Corman-Collins SA, contre La Maison du Whisky SA).

 

La Cour de justice a considéré que “l’article 5, point 1, du règlement retient pour les contrats de vente de marchandises et ceux de fourniture de services l l’obligation caractéristique de ces contrats en tant que critère de rattachement à la juridiction compétente “(CJCE, 23 avril 2009, Falco Privatstiftung et Rabitsch, C 533/07, point 54).

 

@ Un prêt est un contrat de services et l’obligation caractéristique est celle du prêteur CJUE, 15 juin 2017, Saale Kareda c/ Stefan Benkö, C249/16.

 

Dans le cas d’un contrat de vente à distance, deux lieux sont envisagés par la Cour comme lieu de livraison.  Le premier est celui de la remise matérielle de la marchandise à l’acheteur et le second est celui de la remise de la marchandise au premier transporteur en vue de la transmission à l’acheteur.

 

La Cour considère que “le lieu où les marchandises ont été ou auraient dû être matériellement remises à l’acheteur à la destination finale de celles‑ci correspond le mieux à la genèse, aux objectifs et au système du règlement, en tant que «lieu de livraison» au sens de l’article 5, point 1, sous b), premier tiret, de celui‑ci.”

 

Selon la Cour : “ ce critère présente un degré élevé de prévisibilité. Il répond également à l’objectif de proximité, en ce qu’il assure l’existence d’un lien de rattachement étroit entre le contrat et le tribunal appelé à en connaître. Il convient de relever, en particulier, que les marchandises, qui constituent l’objet matériel du contrat, doivent se trouver, en principe, en ce lieu après l’exécution de ce contrat. De plus, l’objectif fondamental d’un contrat de vente de marchandises est le transfert de celles‑ci du vendeur à l’acheteur, opération qui ne s’achève de manière complète que lors de l’arrivée desdites marchandises à leur destination finale.” (CJCE, 5 février 2010, Car Trim GmbH, C-381/08)

 

La Cour a jugé que “l’article 5, point 1, sous b), second tiret, du règlement n° 44/2001 doit être interprété en ce sens que, en cas de transport aérien de personnes d’un État membre à destination d’un autre État membre, effectué sur le fondement d’un contrat conclu avec une seule compagnie aérienne qui est le transporteur effectif, le tribunal compétent pour connaître d’une demande d’indemnisation fondée sur ce contrat de transport et sur le règlement n° 261/2004 est celui, au choix du demandeur, dans le ressort duquel se trouve le lieu de départ ou le lieu d’arrivée de l’avion, tels que ces lieux sont convenus dans ledit contrat.(CJCE, Peter Rehder contre Air Baltic Corporation passagers, C 204/08).”

 

CJUE, 7 nov. 2019,  C‑213/18, Adriano Guaitoli, Concepción Casan Rodriguez, Alessandro Celano Tomassoni, Antonia Cirilli, Lucia Cortini, Mario Giuli, Patrizia Padroni contre easyJet Airline Co. Ltd.

 

« L’article 7, point 1, l’article 67 et l’article 71, paragraphe 1, du règlement (UE) no 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, ainsi que l’article 33 de la convention pour l’unification de certaines règles relatives au transport aérien international, conclue à Montréal le 28 mai 1999 et approuvée au nom de la Communauté européenne par la décision 2001/539/CE du Conseil, du 5 avril 2001, doivent être interprétés en ce sens que la juridiction d’un État membre saisie d’une action visant à obtenir, à la fois, le respect des droits forfaitaires et uniformisés prévus par le règlement (CE) no 261/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 11 février 2004, établissant des règles communes en matière d’indemnisation et d’assistance des passagers en cas de refus d’embarquement et d’annulation ou de retard important d’un vol, et abrogeant le règlement (CEE) no 295/91, et la réparation d’un préjudice complémentaire relevant du champ d’application de cette convention doit apprécier sa compétence, pour le premier chef de demande, au regard de l’article 7, point 1, du règlement no 1215/2012 et, pour le second chef de demande, au regard de l’article 33 de ladite convention. »

 

CJUE, 7 mars 2018 Affaires jointes C‑274/16, C‑447/16 et C‑448/16, flightright GmbH contre Air Nostrum,Líneas Aéreas del Mediterráneo SA (C‑274/16), et Roland Becker contre Hainan Airlines Co. Ltd (C‑447/16),et Mohamed Barkan, Souad Asbai, Assia Barkan, Zakaria Barkan, Nousaiba Barkan Contre Air Nostrum, Líneas Aéreas del Mediterráneo SA (C‑448/16),

 

 

Sur la question posée dans l’affaire C‑447/16

 

« 46      À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, dès lors que les questions posées portent sur l’interprétation du droit de l’Union, la Cour est, en principe, tenue de statuer. Il s’ensuit que les questions portant sur le droit de l’Union bénéficient d’une présomption de pertinence. Le refus de la Cour de statuer sur une question préjudicielle posée par une juridiction nationale n’est possible que s’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation sollicitée du droit de l’Union n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées (arrêt du 27 juin 2017, Congregación de Escuelas Pías Provincia Betania, C‑74/16, EU:C:2017:496, points 24 et 25)

 

51      À cet égard, il convient de rappeler que l’article 5 du règlement no 44/2001 ne s’applique qu’aux personnes domiciliées sur le territoire d’un État membre. Conformément à l’article 60, paragraphe 1, de ce règlement, une société est domiciliée là où est situé son siège statutaire, son administration centrale, ou son principal établissement.

 

52      Or, il ressort de la décision de renvoi que Hainan Airlines a son siège en dehors de l’Union, à savoir en Chine, et n’a pas de succursale à Berlin (Allemagne). Par ailleurs, aucun élément de cette décision ne permet de conclure que cette compagnie aérienne exploite une succursale dans un autre État membre.

 

55. Au vu des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la question posée dans l’affaire C‑447/16 que l’article 5, point 1, sous b), second tiret, du règlement no 44/2001 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’applique pas à un défendeur domicilié dans un État tiers, tel que le défendeur au principal. »

 

Sur les questions posées dans les affaires C‑274/16 et C‑448/16

 

57 : « …il ressort de la décision de renvoi dans cette affaire que, dans les circonstances de l’espèce, le transporteur aérien effectif n’est pas, non plus, le cocontractant des passagers concernés ».

 

62. « … l’article 3, paragraphe 5, seconde phrase, du règlement no 261/2004 précise que, lorsqu’un transporteur aérien effectif qui n’a pas conclu de contrat avec le passager remplit des obligations découlant de ce règlement, il est réputé agir au nom de la personne qui a conclu le contrat avec le passager concerné. ».

 

63      Ainsi, ce transporteur doit être considéré comme remplissant des obligations librement consenties à l’égard du cocontractant des passagers concernés. Ces obligations trouvent leur source dans le contrat de transport aérien.

 

64. Par conséquent, dans des circonstances telles que celles en cause dans les affaires au principal, une demande d’indemnisation pour le retard important d’un vol effectué par un transporteur aérien effectif tel qu’Air Nostrum, qui n’est pas le cocontractant des passagers concernés, doit être considérée comme étant introduite en matière de contrats de transport aérien conclus entre ces passagers et, respectivement, Air Berlin et Iberia.

 

67      À cet égard, la Cour a jugé, s’agissant de l’article 5, point 1, sous b), second tiret, du règlement no 44/2001, que, en cas de pluralité de lieux de fourniture de services dans des États membres différents, il convient, en principe, d’entendre par lieu d’exécution le lieu qui assure le lien de rattachement le plus étroit entre le contrat et la juridiction compétente, ce lien de rattachement le plus étroit se vérifiant, en règle générale, au lieu de la fourniture principale (voir, en ce sens, arrêts du 9 juillet 2009, Rehder, C‑204/08, EU:C:2009:439, points 35 à 38, et du 11 mars 2010, Wood Floor Solutions Andreas Domberger, C‑19/09, EU:C:2010:137, point 33). Ce dernier lieu doit être déduit, dans la mesure du possible, des dispositions du contrat lui-même (arrêt du 11 mars 2010, Wood Floor Solutions Andreas Domberger, C‑19/09, EU:C:2010:137, point 38).

 

68      Ainsi, la Cour a constaté, à l’égard de la même disposition, en relation avec un vol direct effectué par le cocontractant du passager concerné, que le lieu de départ et le lieu d’arrivée de l’avion doivent être considérés, au même titre, comme les lieux de fourniture principale des services faisant l’objet d’un contrat de transport aérien, justifiant la compétence, pour connaître d’une demande d’indemnisation fondée sur ce contrat de transport et sur le règlement no 261/2004, au choix du demandeur, du tribunal dans le ressort duquel se trouve le lieu de départ ou le lieu d’arrivée de l’avion, tels que ces lieux sont convenus dans ledit contrat (arrêt du 9 juillet 2009, Rehder, C‑204/08, EU:C:2009:439, points 43 et 47).

 

73      Dans ces conditions, il y a lieu de constater que, dans le cas d’un vol avec correspondance, constitue le lieu d’exécution d’un tel vol, au sens de l’article 5, point 1, sous b), second tiret, du règlement no 44/2001 et de l’article 7, point 1, sous b), second tiret, du règlement no 1215/2012, en tant que l’un des lieux de fourniture principale des services faisant l’objet d’un contrat de transport aérien, le lieu d’arrivée du second vol.

 

 

Multiplicité de lieux d’exécution

 

CJUE, 11 mars 2010, Wood Floor Solutions Andreas Domberger GmbH contre Silva Trade SA,C-19/09).

 

CJUE,8 mars 2018, Saey Home & Garden NV/SA contre Lusavouga-Máquinas e Acessórios Industriais SA, c-64-17.

 

« L’article 7, point 1, du règlement no 1215/2012 doit être interprété en ce sens que la juridiction compétente, en vertu de cette disposition, pour connaître d’une demande indemnitaire relative à la résiliation d’un contrat de concession commerciale, conclu entre deux sociétés établies et opérant dans deux États membres différents, pour la commercialisation de produits sur le marché national d’un troisième État membre, sur le territoire duquel aucune de ces sociétés ne dispose de succursale ou d’établissement, est celle de l’État membre où se trouve le lieu de la fourniture principale des services, tel qu’il découle des dispositions du contrat ainsi que, à défaut de telles dispositions, de l’exécution effective de ce contrat et, en cas d’impossibilité de le déterminer sur cette base, celui du domicile du prestataire. »

 

En matière délictuelle ou quasi délictuelle

 

 

En dehors de l’hypothèse particulière de l’une action en réparation de dommage ou d’une action en restitution fondées sur une infraction  (art. 7 point 3), la compétence de la matière délictuelle est fondée sur l’article 7 point 2 du Règlement 1215/2012 du 12 décembre 2012 du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale qui dispose qu’une personne domiciliée sur le territoire d’un État membre peut être attraite, dans un autre État membre: « en matière délictuelle ou quasi délictuelle, devant le tribunal du lieu où le fait dommageable s’est produit ou risque de se produire ».

La matière délictuelle est définie par la Cour de Justice de manière autonome. La Cour de Justice considère qu’est délictuelle la demande relative à la responsabilité d’un défendeur qui ne se rattache pas à la matière contractuelle (CJCE, 27 sept. 1988, aff. 189/87, Kalfelis ; CJUE, 28 janv. 2015, Kolassa, C-375/13, point 44).

CJUE, 10 sept. 2015, Holterman Ferho Exploitatie e.a. C-47/14)

CJCE, 19 septembre 1995, Marinari, C‑364/93).

CJCE, 10 juin 2004, Kronhofer, C‑168/02).

CJUE, Universal Music International Holding BV contre Michael Tétreault Schilling, Irwin Schwartz, Josef Brož, C-12/15

CJCE, 7 mars 1995, Fiona Shevill, C. 68/93.

CJUE,  25 octobre 2011, Olivier Martinez et Robert Martinez contre MGN Limited, C-161/10, v. ég. CJUE,  25 octobre 2011, E-Date Advertising, C‑509/09.

CJUE, 19 avril 2012, Wintersteiger, C‑523/10 ; CJUE, 22 janv. 2015, Pez Hedjuck contre EnergieAgentur.NRW Gmbh, C-441/13.

CJUE 17 oct. 2017, Bolagsupplysningen OÜ, Ingrid Ilsjan c/ Svensk Handel AB, C-194-16

CJUE, 21 déc. 2016, Concurrence Sarl c/ Samsung Electronics France SAS et Amazon Services Europe

CJUE, 21 mai 2015 CDC Cartel Damage Claims Hydrogen Peroxide SA contreEvonik Degussa GmbH et ae, C‑352/13).

CJUE, 16 juin 2016, Universal Music International Holding BV contre Michael Tétreault Schilling, Irwin Schwartz, Josef Brož, C-12/15

 

Litiges relatifs à la restitution d’un bien culturel (art. 7 4) : lieu de situation du bien au moment de la saisine

 

En matière de succursales, agences ou établissements (art. 7, 5)

 

Lorsqu’il  s’agit d’une contestation relative à l’exploitation d’une succursale, d’une agence ou de tout autre établissement, le tribunal du lieu de leur situation est compétent (art. 7-5°);

 

CJCE, 6 oct. 1976 :  Gaz. Pal. 1977.1.100 ; CJCE, 22 nov. 1973 :  DS 1979, IR, p. 4458; CJCE, 18 mars 1981 :  Gaz. Pal. 1981.2, somm. 220 ; CJCE, 9 déc. 1987 :  Gaz. Pal. 1988.2, somm. 424 ;  DS 1988, somm. 172; Cass. com., 26 oct. 1993, no 91-17.851 : Bull. civ. IV, no 358.

 

CJCE 22 nov. 1978, Somafer SA, aff. 33/78, Rec. 2183,

CJCE, 6 avr. 1995, Lloyd’s Register of Shipping, aff. C-439/93

CJCE, 9 déc. 1987, SAR Schotte, aff. 218/86, Rec. 4905)

 

6) en sa qualité de fondateur, de trustee ou de bénéficiaire d’un trust constitué soit en application de la loi, soit par écrit ou par une convention verbale, confirmée par écrit, devant les tribunaux de l’État membre sur le territoire duquel le trust a son domicile (art. 7-6)

7) s’il s’agit d’une contestation relative au paiement de la rémunération réclamé en raison de l’assistance ou du sauvetage dont a bénéficié une cargaison ou un fret, devant le tribunal dans le ressort duquel cette cargaison ou le fret s’y rapportant:

a) a été saisi pour garantir ce paiement, ou
b) aurait pu être saisi à cet effet, mais une caution ou une autre sûreté a été donnée,
cette disposition ne s’applique que s’il est prétendu que le défendeur a un droit sur la cargaison ou sur le fret ou qu’il avait un tel droit au moment de cette assistance ou de ce sauvetage (art. 5-7)

 

b) Règles de compétence et de procédure fondées sur une bonne administration de la justice

 

Article 8 : connexité, (pluralité de défendeurs, intervention forcée, demande reconventionnelle; jonction d’instances)

“ Cette même personne (le défendeur) peut aussi être attraite”:

“1) s’il y a plusieurs défendeurs, devant le tribunal du domicile de l’un d’eux, à condition que les demandes soient liées entre elles par un rapport si étroit qu’il y a intérêt à les instruire et à les juger en même temps afin d’éviter des solutions qui pourraient  être inconciliables si les causes étaient jugées séparément” (Cass. com., 14 juin 1983 : Bull. civ. IV, no 170 ; CJCE, 27 sept. 1988 :  DS 1989, IR, p. 19; Cass. com., 31 janv. 1995, no 92-20.375 : Bull. civ. IV, no 28) 😉 .

Le domicile de l’un des défendeurs est  déterminé suivant la loi interne (Cass. 1re civ., 9 déc. 1997, no 95-17.619).Mais la pluralité de défendeurs n’a pas pour effet d’étendre à des parties qui ne l’ont pas acceptée une clause attributive de compétence (Cass. 1re civ., 5 janv. 1999, no 96-19.895, arrêt  no 1 P, Compagnie Taisho marine et fire et autres c/ Homont ès qual. et autres : Bull. civ. I, no 5).

 

L’article 6, point 1, du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, doit être interprété en ce sens que le fait que des demandes introduites contre plusieurs défendeurs ont des fondements juridiques différents ne fait pas obstacle à l’application de cette disposition.

L’article 6, point 1, du règlement n° 44/2001 s’applique lorsque les demandes formées contre les différents défendeurs sont connexes lors de leur introduction, c’est-à-dire lorsqu’il y a intérêt à les instruire et à les juger ensemble afin d’éviter des solutions qui pourraient être inconciliables si les causes étaient jugées séparément, sans qu’il soit en outre nécessaire d’établir de manière distincte que les demandes n’ont pas été formées à la seule fin de soustraire l’un des défendeurs aux tribunaux de l’État membre où il est domicilié (CJCE, 11 octobre 2007,  C 98/06,  Freeport plc contre Olle Arnoldsson)

 

 

“2) s’il s’agit d’une demande en garantie ou d’une demande en intervention, devant le tribunal saisi de la demande originaire…”

CJCE, 15 mai 1990, aff. 365/88, Kongress Agentur Hagen Gmbh c/ Zeehaghe BV ; Cass. 1re civ., 14 mai 1992, no 90-16.295 : Bull. civ. I, no 134

 

“… à moins qu’elle n’ait été formée que pour traduire hors de son tribunal celui qui a été appelé.”

(Cass. civ., 24 mars 1987 : Bull. civ. I, no 108 ;  Gaz. Pal. 1987.2, pan. 159; Cass. com., 21 févr. 1984 : Bull. civ. IV, no 68).

 

Sur le conflit avec une clause attributive de juridiction :

 

(Cass. 1re civ., 18 oct. 1989 : Bull. civ. I, no 321; Cass. com., 12 mai 1992, no 89-19.518 : Bull. civ. IV, no 179)

 

3)s’il s’agit d’une demande reconventionnelle qui dérive du contrat ou du fait sur lequel est fondée la demande originaire, devant le tribunal saisi de celle-ci (Cass. ass. plén., 18 févr. 1994 : Bull. civ. p. 3; CJCE, 13 juill. 1995, aff. C. 341/93, Danvaern Production A/S c/ Schuhfabriken otterbeck Gmbh & Co).

 

4) en matière contractuelle, si l’action peut être jointe à une action en matière de droits réels immobiliers dirigée contre le même défendeur, devant le tribunal de l’État membre sur le territoire duquel l’immeuble est situé.

 

Article 9

Lorsque, en vertu du présent règlement, un tribunal d’un État membre est compétent pour connaître des actions en responsabilité du fait de l’utilisation ou de l’exploitation d’un navire, ce tribunal ou tout autre que lui substitue la loi interne de cet État membre connaît aussi des demandes relatives à la limitation de cette responsabilité.

 

 

SECTION 9  Litispendance et connexité

 

Article 29

 

1.   Sans préjudice de l’article 31, paragraphe 2, lorsque des demandes ayant le même objet et la même cause sont formées entre les mêmes parties devant des juridictions d’États membres différents, la juridiction saisie en second lieu sursoit d’office à statuer jusqu’à ce que la compétence de la juridiction première saisie soit établie.

 

2.   Dans les cas visés au paragraphe 1, à la demande d’une juridiction saisie du litige, toute autre juridiction saisie informe sans tarder la première juridiction de la date à laquelle elle a été saisie conformément à l’article 32.

 

3.   Lorsque la compétence de la juridiction première saisie est établie, la juridiction saisie en second lieu se dessaisit en faveur de celle-ci.

 

Article 30

 

1.   Lorsque des demandes connexes sont pendantes devant des juridictions d’États membres différents, la juridiction saisie en second lieu peut surseoir à statuer.

 

2.   Lorsque la demande devant la juridiction première saisie est pendante au premier degré, toute autre juridiction peut également se dessaisir, à la demande de l’une des parties, à condition que la juridiction première saisie soit compétente pour connaître des demandes en question et que sa loi permette leur jonction.

 

3.   Sont connexes, au sens du présent article, les demandes liées entre elles par un rapport si étroit qu’il y a intérêt à les instruire et à les juger en même temps afin d’éviter des solutions qui pourraient être inconciliables si les causes étaient jugées séparément.

 

Article 31

 

1.   Lorsque les demandes relèvent de la compétence exclusive de plusieurs juridictions, le dessaisissement a lieu en faveur de la juridiction première saisie.

 

2.   Sans préjudice de l’article 26, lorsqu’une juridiction d’un État membre à laquelle une convention visée à l’article 25 attribue une compétence exclusive est saisie, toute juridiction d’un autre État membre sursoit à statuer jusqu’à ce que la juridiction saisie sur le fondement de la convention déclare qu’elle n’est pas compétente en vertu de la convention.

 

3.   Lorsque la juridiction désignée dans la convention a établi sa compétence conformément à la convention, toute juridiction d’un autre État membre se dessaisit en faveur de ladite juridiction.

 

4.   Les paragraphes 2 et 3 ne s’appliquent pas aux matières visées dans les sections 3, 4 ou 5 lorsque le preneur d’assurance, l’assuré, un bénéficiaire du contrat d’assurance, la victime, le consommateur ou le travailleur est le demandeur et que la convention n’est pas valide en vertu d’une disposition figurant dans lesdites sections.

 

Article 32

1.   Aux fins de la présente section, une juridiction est réputée saisie:

 

a) à la date à laquelle l’acte introductif d’instance ou un acte équivalent est déposé auprès de la juridiction, à condition que le demandeur n’ait pas négligé par la suite de prendre les mesures qu’il était tenu de prendre pour que l’acte soit notifié ou signifié au défendeur; ou

 

b)  si l’acte doit être notifié ou signifié avant d’être déposé auprès de la juridiction, à la date à laquelle il est reçu par l’autorité chargée de la notification ou de la signification, à condition que le demandeur n’ait pas négligé par la suite de prendre les mesures qu’il était tenu de prendre pour que l’acte soit déposé auprès de la juridiction.

 

L’autorité chargée de la notification ou de la signification visée au point b) est la première autorité ayant reçu les actes à notifier ou à signifier.

 

2.   La juridiction ou l’autorité chargée de la notification ou de la signification visée au paragraphe 1, consigne respectivement la date du dépôt de l’acte introductif d’instance ou de l’acte équivalent ou la date de la réception des actes à notifier ou à signifier.

 

Article 33

 

1.   Lorsque la compétence est fondée sur l’article 4 ou sur les articles 7, 8 ou 9 et qu’une procédure est pendante devant une juridiction d’un État tiers au moment où une juridiction d’un État membre est saisie d’une demande entre les mêmes parties ayant le même objet et la même cause que la demande portée devant la juridiction de l’État tiers, la juridiction de l’État membre peut surseoir à statuer si:

 

a) l’on s’attend à ce que la juridiction de l’État tiers rende une décision susceptible d’être reconnue et, le cas échéant, d’être exécutée dans ledit État membre; et

 

b) la juridiction de l’État membre est convaincue que le sursis à statuer est nécessaire pour une bonne administration de la justice.

 

2.   La juridiction de l’État membre peut poursuivre l’instance à tout moment si:

 

a)  l’instance devant la juridiction de l’État tiers fait elle-même l’objet d’un sursis à statuer ou d’un désistement;

 

b) la juridiction de l’État membre estime que la procédure devant la juridiction de l’État tiers ne pourra vraisemblablement pas être conclue dans un délai raisonnable; ou

 

c) la poursuite de l’instance est indispensable à une bonne administration de la justice.

 

3.   La juridiction de l’État membre met fin à l’instance si la procédure devant la juridiction de l’État tiers est conclue et a donné lieu à une décision qui est susceptible d’être reconnue et, le cas échéant, d’être exécutée dans ledit État membre.

 

4.   La juridiction de l’État membre applique le présent article soit à la demande d’une des parties, soit d’office, lorsque cette possibilité est prévue par le droit national.

 

Article 34

1.   Lorsque la compétence est fondée sur l’article 4 ou sur les articles 7, 8 ou 9 et qu’une action est pendante devant une juridiction d’un État tiers au moment où une juridiction d’un État membre est saisie d’une demande connexe à celle portée devant la juridiction de l’État tiers, la juridiction de l’État membre peut surseoir à statuer si:

 

a) il y a intérêt à instruire et juger les demandes connexes en même temps afin d’éviter des solutions qui pourraient être inconciliables si les causes étaient jugées séparément;

 

b) l’on s’attend à ce que la juridiction de l’État tiers rende une décision susceptible d’être reconnue et, le cas échéant, d’être exécutée dans cet État membre; et

 

c) la juridiction de l’État tiers concernée est convaincue que le sursis à statuer est nécessaire pour une bonne administration de la justice.

 

2.   La juridiction de l’État membre peut poursuivre l’instance à tout moment si:

 

a) elle estime qu’il n’existe plus de risque que les décisions soient inconciliables;

 

b) l’instance devant la juridiction de l’État tiers fait elle-même l’objet d’un sursis à statuer ou d’un désistement;

 

c) elle estime que la procédure devant la juridiction de l’État tiers ne pourra vraisemblablement pas être conclue dans un délai raisonnable; ou

 

d) la poursuite de l’instance est indispensable à une bonne administration de la justice.

 

3.   La juridiction de l’État membre peut mettre fin à l’instance si la procédure devant la juridiction de l’État tiers est conclue et a donné lieu à une décision qui est susceptible d’être reconnue et, le cas échéant, d’être exécutée dans ledit État membre.

 

4.   La juridiction de l’État membre applique le présent article soit à la demande d’une des parties, soit d’office, lorsque cette possibilité est prévue par le droit national.

 

 

SECTION 10. Mesures provisoires et conservatoires

 

Article 35

 

Les mesures provisoires ou conservatoires prévues par la loi d’un État membre peuvent être demandées aux juridictions de cet État, même si les juridictions d’un autre État membre sont compétentes pour connaître du fond.

 

Les mesures provisoires sont celles destinées à maintenir une situation de fait ou de droit afin de sauvegarder ces droits dont la reconnaissance est par ailleurs demandée aux juges du fond ( CJCE, 26 mars 1992, Reichert et Kokler, C- 261/ 90, Rec. I-2149).

Il a été jugé qu’un référé-provision n’est pas en principe une mesure provisoire (CJCE, 17 nov. 1998, aff. C-391/95, Van Uden c/ Deco-line, JDI 1999, p.613, note A. Huet; civ. 1re, 13 av. 1999, rev. Cr. 1999, p. 340). Il ne peut en aller autrement que si le remboursement est garanti et que si  la mesure ne porte que sur des avoirs déterminés du défendeur se situant ou devant se situer dans la sphère de compétence territoriale du juge saisi (civ. 1re, 13 av. 1999; rev. Crit. 1999, p. 352).

 

L’audition, devant une juridiction d’un État contractant, d’un témoin qui est domicilié sur le territoire de cet État ayant  pour objectif d’établir des faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige futur pour lequel une juridiction d’un autre État contractant serait compétente et pour but de permettre au demandeur d’évaluer l’opportunité d’une action éventuelle, de déterminer le fondement d’une telle action et d’apprécier la pertinence des moyens pouvant être invoqués dans ce cadre ne répond pas à la finalité poursuivie par l’article 24 de la convention, telle qu’elle a été rappelée aux points 12 et 13 du présent arrêt (CJCE, 28 avr. 2005, C-104/03, St. Paul Dairy Industries NV) contre Unibel Exser BVBA.

 

 

 

 

2. Règles de compétence protectrices

 

 

 

a) Compétence en matière d’assurances

 

CJCE, 26 mai 2005, C-77/04, Groupement d’intérêt économique (GIE) Réunion européenne e.a. contre Zurich España, Société pyrénéenne de transit d’automobiles (Soptrans) :

“ Selon une jurisprudence constante, il ressort de l’examen des dispositions de ladite section, éclairées par leurs travaux préparatoires, que, en offrant à l’assuré une gamme de compétences plus étendue que celle dont dispose l’assureur et en excluant toute possibilité de clause de prorogation de compétence au profit de ce dernier, elles ont été inspirées par un souci de protection de l’assuré, lequel, le plus souvent, se trouve confronté à un contrat prédéterminé dont les clauses ne sont plus négociables et constitue la personne économiquement la plus faible »

CJCE, 14 juillet 1983, Gerling e.a., 201/82 ; 13 juill. 2000, Group Josi, C-412/98).

 

Il convient de distinguer suivant que l’assureur est défendeur ou demandeur avant de considérer les clauses dérogatoires.

 

Défendeur

 

L’assureur domicilié sur le territoire d’un Etat contractant peut être attrait soit devant le tribunal de l’Etat où il est domicilié, soit devant celui où le preneur d’assurance, l’assuré ou son bénéficiaire a son domicile ou devant le tribunal d’un Etat membre saisi de l’action formée contre l’apériteur de la coassurance ( art. 9-1).

Tout établissement d’un assureur  non  domicilié au sens du dip dans un Etat membre est considéré comme le domicile de cet assureur du point de vue du Règlement (art. 9-2).

 

En outre, il peut être attrait devant le tribunal du lieu où le fait dommageable s’est produit s’il s’agit d’assurance de responsabilité ou d’assurance portant sur des immeubles (éventuellement sur des meubles dès lors que la police concerne les immeubles et les meubles et que le dommage résulte d’un même sinistre)  (art. 10).

Ces dispositions sont aussi applicables en cas d’action directe intentée par la victime contre l’assureur (art. 11-2). La compétence peut alors être étendue au preneur d’assurance ou de l’assuré mis en cause (art. 11-3).

 

 

 

Demandeur

 

Lorsque l’assureur agit contre l’assuré, le preneur d’assurance ou son bénéficiaire, il doit agir devant le tribunal du domicile de celui-ci sauf mise en cause conformément à l’article 11-3 (v. En ce sens l’article 12-1).

 

En outre, l’article 12-2 précise que “Les dispositions de la présente section ne portent pas atteinte au droit d’introduire une demande reconventionnelle devant le tribunal saisi d’une demande originaire conformément à la présente section”.

 

 

 

b) Compétence en matière de contrats conclus par les consommateurs

Article 17 R_

 

En matière de contrat conclu par une personne, le consommateur, pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle, la compétence est déterminée par la présente section, sans préjudice de l’article 6 et de l’article 7, point 5):

a) lorsqu’il s’agit d’une vente à tempérament d’objets mobiliers corporels;

b) lorsqu’il s’agit d’un prêt à tempérament ou d’une autre opération de crédit liés au financement d’une vente de tels objets; ou

c) lorsque, dans tous les autres cas, le contrat a été conclu avec une personne qui exerce des activités commerciales ou professionnelles dans l’État membre sur le territoire duquel le consommateur a son domicile ou qui, par tout moyen, dirige ces activités vers cet État membre ou vers plusieurs États, dont cet État membre, et que le contrat entre dans le cadre de ces activités.

2.   Lorsque le cocontractant du consommateur n’est pas domicilié sur le territoire d’un État membre mais possède une succursale, une agence ou tout autre établissement dans un État membre, il est considéré pour les contestations relatives à leur exploitation comme ayant son domicile sur le territoire de cet État membre.

3.   La présente section ne s’applique pas aux contrats de transport autres que ceux qui, pour un prix forfaitaire, combinent voyage et hébergement.

 

Ø   Domaine d’application

 

CJCE,  21 juin 1978, Bertrand, C- 150/77 ;  19 janvier 1993, Shearson Lehman Hutton, C-89/91,.,

CJCE 3 juill. 1997, C-269/95,  Francesco Benincasa et Dentalkit Srl.

CJCE, 14 mars 2013,  C‑419/11, Česká spořitelna a.s. contre Gerald Feichter.

CJCE, 1er oct. 2002, C-167/00 Verein für Konsumenteninformation , et Karl Heinz Henkel.

CJCE, 20 janv. 2005, C-27/02, Petra Engler c/ Janus Versand)

CJCE, 20 janv. 2005,  C-464/01, Johann Gruber C/ BayWa AG)

CJUE 3 octobre 2019, C‑208/18, Jana Petruchová contre FIBO Group Holdings Limited,

CJUE, 14 février 2019, Anica Milivojević contre Raiffeisenbank St. Stefan-Jagerberg-Wolfsberg eGen ; C-630/17)

CJUE, 25 juill. 2018, Maximilian Schrems c./ Facebook ireland Limited, C-498/16.

“c) lorsque, dans tous les autres cas, le contrat a été conclu avec une personne qui exerce des activités commerciales ou professionnelles dans l’État membre sur le territoire duquel  le consommateur a son domicile ou qui, par tout moyen, dirige ces activités vers cet État membre ou vers plusieurs États, dont cet État membre, et que le contrat entre dans le cadre de ces activités.”

 

CJCE, 11 juillet 2002, C-96/00, Rudolf Gabriel

 

CJUE, 7 déc. 2010, Peter Pammer contre Reederei Karl Schlüter GmbH & Co. KG (C‑585/08), et Hotel Alpenhof GesmbH  contre Oliver Heller (C‑144/09).

« Afin de déterminer si un commerçant, dont l’activité est présentée sur son site Internet ou sur celui d’un intermédiaire, peut être considéré comme «dirigeant» son activité vers l’État membre sur le territoire duquel le consommateur a son domicile, au sens de l’article 15, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 44/2001, il convient de vérifier si, avant la conclusion éventuelle d’un contrat avec le consommateur, il ressort de ces sites Internet et de l’activité globale du commerçant que ce dernier envisageait de commercer avec des consommateurs domiciliés dans un ou plusieurs États membres, dont celui dans lequel ce consommateur a son domicile, en ce sens qu’il était disposé à conclure un contrat avec eux.

Les éléments suivants, dont la liste n’est pas exhaustive, sont susceptibles de constituer des indices permettant de considérer que l’activité du commerçant est dirigée vers l’État membre du domicile du consommateur, à savoir la nature internationale de l’activité, la mention d’itinéraires à partir d’autres États membres pour se rendre au lieu où le commerçant est établi, l’utilisation d’une langue ou d’une monnaie autres que la langue ou la monnaie habituellement utilisées dans l’État membre dans lequel est établi le commerçant avec la possibilité de réserver et de confirmer la réservation dans cette autre langue, la mention de coordonnées téléphoniques avec l’indication d’un préfixe international, l’engagement de dépenses dans un service de référencement sur Internet afin de faciliter aux consommateurs domiciliés dans d’autres États membres l’accès au site du commerçant ou à celui de son intermédiaire, l’utilisation d’un nom de domaine de premier niveau autre que celui de l’État membre où le commerçant est établi et la mention d’une clientèle internationale composée de clients domiciliés dans différents États membres. Il appartient au juge national de vérifier l’existence de tels indices.

En revanche, la simple accessibilité du site Internet du commerçant ou de celui de l’intermédiaire dans l’État membre sur le territoire duquel le consommateur est domicilié est insuffisante. Il en va de même de la mention d’une adresse électronique ainsi que d’autres coordonnées ou de l’emploi d’une langue ou d’une monnaie qui sont la langue et/ou la monnaie habituellement utilisées dans l’État membre dans lequel le commerçant est établi. »

CJUE, 17 octobre 2013 Lokman Emrek contre Vlado Sabranovic, C 218/12.

CJUE, 23 déc. 2015, C‑297/14, Rüdiger Hobohm contre Benedikt Kampik Ltd & Co. KG, Benedikt Aloysius Kampik,Mar Mediterraneo Werbe‑ und Vertriebsgesellschaft für Immobilien SL.

 

Ø   Contenu des règles

 

L’article 18 § 1 dispose que «  L’action intentée par un consommateur contre l’autre partie au contrat peut être portée soit devant les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel est domiciliée cette partie, soit, quel que soit le domicile de l’autre partie, devant la juridiction du lieu où le consommateur est domicilié. »

Conformément à l’article 17 § 2 :

 

« 2. Lorsque le cocontractant du consommateur n’est pas domicilié sur le territoire d’un État membre, mais possède une succursale, une agence ou tout autre établissement dans un État membre, il est considéré pour les contestations relatives à leur exploitation comme ayant son domicile sur le territoire de cet État. »

 

 

c) Compétence en matière de contrats individuels de travail (art. 20 à 23).

 

Article 20

 

1.   En matière de contrats individuels de travail, la compétence est déterminée par la présente section, sans préjudice de l’article 6, de l’article 7, point 5), et, dans le cas d’une action intentée à l’encontre d’un employeur, de l’article 8, point 1).

 

2.   Lorsqu’un travailleur conclut un contrat individuel de travail avec un employeur qui n’est pas domicilié dans un État membre mais possède une succursale, une agence ou tout autre établissement dans un État membre, l’employeur est considéré, pour les contestations relatives à leur exploitation, comme ayant son domicile dans cet État membre.

 

Article 21

 

1.   Un employeur domicilié sur le territoire d’un État membre peut être attrait:

 

a) devant les juridictions de l’État membre où il a son domicile; ou

b) dans un autre État membre:

 

i)devant la juridiction du lieu où ou à partir duquel le travailleur accomplit habituellement son travail ou devant la juridiction du dernier lieu où il a accompli habituellement son travail; ou

 

ii) lorsque le travailleur n’accomplit pas ou n’a pas accompli habituellement son travail dans un même pays, devant la juridiction du lieu où se trouve ou se trouvait l’établissement qui a embauché le travailleur.

 

2.   Un employeur qui n’est pas domicilié sur le territoire d’un État membre peut être attrait devant les juridictions d’un État membre conformément au paragraphe 1, point b).

 

Article 22

 

1.   L’action de l’employeur ne peut être portée que devant les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel le travailleur a son domicile.

 

2.   Les dispositions de la présente section ne portent pas atteinte au droit d’introduire une demande reconventionnelle devant la juridiction saisie de la demande originaire conformément à la présente section.

 

Article 23

 

Il ne peut être dérogé aux dispositions de la présente section que par des conventions:

 

1)postérieures à la naissance du différend; ou

 

2)qui permettent au travailleur de saisir d’autres juridictions que celles indiquées à la présente section.

 

CJCE, Shenavai, 15 janv. 1987, 266/85, EU:C:1987:11, point 16.

CJCE,  Lawrie‑Blum, 3 juill. 1986, C-66/85)

CJUE, 10 sept. 2015, C-47/14, Holterman Ferho Exploitatie BV et autres c/ FLF Spies von Büllesheim.

 

Aux termes de l’article 20 § 2 :

 

“Lorsqu’un travailleur conclut un contrat individuel de travail avec un employeur qui n’est pas domicilié dans un État membre mais possède une succursale, une agence ou tout autre établissement dans un État membre, l’employeur est considéré, pour les contestations relatives à leur exploitation, comme ayant son domicile dans cet État membre.”

 

 

3. Règles de compétence exclusive

 

 

Article 24
Sont seules compétentes les juridictions ci-après d’un État membre, sans considération de domicile des parties:

 

1)
en matière de droits réels immobiliers et de baux d’immeubles, les juridictions de l’État membre où l’immeuble est situé.

Toutefois, en matière de baux d’immeubles conclus en vue d’un usage personnel temporaire pour une période maximale de six mois consécutifs, sont également compétentes les juridictions de l’État membre dans lequel le défendeur est domicilié, à condition que le locataire soit une personne physique et que le propriétaire et le locataire soient domiciliés dans le même État membre;
2)
en matière de validité, de nullité ou de dissolution des sociétés ou personnes morales, ou de validité des décisions de leurs organes, les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel celles-ci ont leur siège. Pour déterminer le siège, le juge applique les règles de son droit international privé;

 

L’article 22, point 2, du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, doit être interprété en ce sens que ne concerne pas la validité des décisions des organes d’une société, au sens de cette disposition, une action, telle celle en cause au principal, dans le cadre de laquelle une partie allègue qu’une décision adoptée par un organe d’une société a violé les droits que ladite partie prétend tirer des statuts de cette société (CJCE, 2 octobre 2008, C-372/07, Nicole Hassett contre South Eastern Health Board, contre  North Western Health Board)

 

3)
en matière de validité des inscriptions sur les registres publics, les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel ces registres sont tenus;
4)
en matière d’inscription ou de validité des brevets, marques, dessins et modèles, et autres droits analogues donnant lieu à dépôt ou à un enregistrement, que la question soit soulevée par voie d’action ou d’exception, les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel le dépôt ou l’enregistrement a été demandé, a été effectué ou est réputé avoir été effectué aux termes d’un instrument de l’Union ou d’une convention internationale.

 

Sans préjudice de la compétence reconnue à l’Office européen des brevets par la convention sur la délivrance des brevets européens, signée à Munich le 5 octobre 1973, les juridictions de chaque État membre sont seules compétentes en matière d’inscription ou de validité d’un brevet européen délivré pour cet État membre;

 

L’article 16, point 4, de la convention du 27 septembre 1968 sur la compétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, telle que modifiée en dernier lieu par la convention du 29 novembre 1996 relative à l’adhésion de la République d’Autriche, de la République de Finlande et du Royaume de Suède, doit être interprété en ce sens que la règle de compétence exclusive qu’il édicte concerne tous les litiges portant sur l’inscription ou la validité d’un brevet, que la question soit soulevée par voie d’action ou d’exception. (CJCE, 13 juillet 2006, C-4/03, Gesellschaft für Antriebstechnik mbH & Co. KG contre Lamellen und Kupplungsbau Beteiligungs KG)

 

5)
en matière d’exécution des décisions, les juridictions de l’État membre du lieu de l’exécution.
 

 

II. COMPÉTENCE  ATTRIBUEE PAR LES PARTIES

 

Art. 25 :  «  Si les parties, sans considération de leur domicile, sont convenues d’une juridiction ou de juridictions d’un État membre pour connaître des différends nés ou à naître à l’occasion d’un rapport de droit déterminé, ces juridictions sont compétentes, sauf si la validité de la convention attributive de juridiction est entachée de nullité quant au fond selon le droit de cet État membre. Cette compétence est exclusive, sauf convention contraire des parties. La convention attributive de juridiction est conclue:

 

a) par écrit ou verbalement avec confirmation écrite;

 

b) sous une forme qui soit conforme aux habitudes que les parties ont établies entre elles; ou

 

c) dans le commerce international, sous une forme qui soit conforme à un usage dont les parties ont connaissance ou étaient censées avoir connaissance et qui est largement connu et régulièrement observé dans ce type de commerce par les parties à des contrats du même type dans la branche commerciale considérée.

 

2.   Toute transmission par voie électronique qui permet de consigner durablement la convention est considérée comme revêtant une forme écrite.

 

3.   Les juridictions d’un État membre auxquelles l’acte constitutif d’un trust attribue compétence sont exclusivement compétentes pour connaître d’une action contre un fondateur, un trustee ou un bénéficiaire d’un trust, s’il s’agit des relations entre ces personnes ou de leurs droits ou obligations dans le cadre du trust.

 

4.   Les conventions attributives de juridiction ainsi que les stipulations similaires d’actes constitutifs de trust sont sans effet si elles sont contraires aux dispositions des articles 15, 19 ou 23 ou si les juridictions à la compétence desquelles elles dérogent sont exclusivement compétentes en vertu de l’article 24.

 

5.   Une convention attributive de juridiction faisant partie d’un contrat est considérée comme un accord distinct des autres clauses du contrat.

 

Les dispositions de l’article 5, nº 1, de la Convention qui permettent d’attraire en matière contractuelle le défendeur domicilié sur le territoire d’un Etat contractant devant le tribunal du lieu où l’obligation a été ou doit être exécutée, introduisent un critère de compétence, dont le choix dépend d’une option du demandeur et qui est justifié par l’existence d’un lien de rattachement direct entre la contestation et le tribunal appelé à en connaître.

Par contre, l’article 17 de la Convention, qui prévoit la compétence exclusive du tribunal désigné par les parties selon les formes prescrites, écarte ainsi les règles de compétence tant générales – prévues à l’article 2 de la Convention – que spéciales – prévues à l’article 5 – et fait abstraction de tout élément objectif de connexité entre le rapport litigieux et le tribunal désigné. Ainsi, il apparaît que la compétence du tribunal du lieu d’exécution et celle du tribunal élu sont deux concepts distincts, et que seules les conventions d’élection de for sont soumises aux exigences de forme prévues à l’article 17 de la Convention  (CJCE 17 janvier 1980, Zelger / Salinitri (56/79, Rec._p._00089)

 

La Cour a ensuite précisé que :

« La convention doit être interprétée en ce sens qu’un accord verbal sur le lieu d’exécution, qui vise non pas à déterminer l’endroit où le débiteur devra exécuter effectivement la prestation qui lui incombe, mais exclusivement à établir un lieu de for déterminé, n’est pas régi par l’article 5, point 1, de la convention, mais par l’article 17 de celle-ci et n’est valide que lorsque les conditions y énoncées sont respectées. En effet, si les parties sont libres de convenir d’un lieu d’exécution des obligations contractuelles différent de celui qui serait déterminé en vertu de la loi applicable au contrat, sans être tenues de respecter des conditions de forme particulières, elles ne sauraient pour autant, au regard du système établi par la convention, fixer, dans le seul but de déterminer un for compétent, un lieu d’exécution ne présentant aucun lien effectif avec la réalité du contrat et auquel les obligations découlant du contrat ne pourraient pas être exécutées suivant les termes de celui-ci « (CJCE 20 février 1997, MSG / Les Gravières Rhénanes (C-106/95)

A. Règles générales

 

Le juge saisi a l’obligation d’examiner si la clause qui lui attribue compétence a fait effectivement l’objet d’un consentement entre les parties, qui doit se manifester d’une manière claire et précise (CJCE 14 décembre 1976, Estasis Salotti / Ruewa (24-76, Rec._p._01831).

 

1) Acceptation expresse

 

La  convention attributive de juridiction doit remplir certaines conditions.

 

CJCE 14 décembre 1976, Estasis Salotti / Ruewa,24-76).

CJCE 11 novembre 1986, Iveco Fiat / Van Hool, 313/85)

CJUE, 21 mai 2015, ECLI :EU :C :2015 :334 ; Jaouad El Madjoub c/ CarsOnTheWeb.Deutschland GmbH ; C-322/14.

CJUE,8 mars 2018, Saey Home & Garden NV/SA contre Lusavouga-Máquinas e Acessórios Industriais SA, c-64-17,

 

Mais elle peut également être conclue sous une forme conforme aux habitudes que les parties ont établies entre elles (art. 23 § 1 b), ou  conforme à un usage du commerce international dont les parties avaient connaissance ou étaient censées avoir connaissance et qui est largement connu et réguli rement observé dans ce type de commerce par les parties   des contrats du m me type dans la branche commerciale considérée (art. 23§ 1 c).

 

A cet égard, il existe un usage dans une branche du commerce international lorsque, notamment, un certain comportement est généralement suivi par les parties contractantes opérant dans cette branche lors de la conclusion de contrats d’un certain type. La connaissance de cet usage de la part des parties contractantes est établie lorsque, notamment, elles avaient auparavant noué des rapports commerciaux entre elles ou avec d’autres parties opérant dans la branche commerciale en question ou lorsque, dans celle-ci, un certain comportement est généralement et régulièrement suivi lors de la conclusion d’un certain type de contrats, de sorte qu’il peut  être considéré comme une pratique consolidée (CJCE, 20 févr. 1997,  aff. C. 106/95, Mainschiffahrts-Genossenschaft Eg (MSG) c/ Les Gravi res rhénanes SARL : Rec. P.I-911)

 

Le fait pour l’acheteur de ne pas élever d’objections contre une confirmation  émanée verbalement de l’autre partie ne vaut pas acceptation en ce qui concerne la clause attributive, sauf si l’accord verbal se situe dans le cadre de rapports commerciaux courants entre parties, établis sur la base des conditions générales de l’une d’elles comportant la clause attributive :

“dans le cadre d’un contrat conclu verbalement dans le commerce international, une convention attributive de juridiction est censée être valablement conclue, au regard de cette disposition, du fait de l’absence de réaction de l’autre partie contractante à une lettre de confirmation commerciale que son cocontractant lui a envoyée, ou du paiement répété et sans contestation de factures, lorsque ces documents contiennent une mention préimprimée indiquant le lieu du for, si un tel comportement correspond à un usage régissant le domaine du commerce international dans lequel opèrent les parties en question et si ces dernières connaissent cet usage ou sont censées le connaître” (CJCE, 20 févr. 1997,  aff. C. 106/95, Mainschiffahrts-Genossenschaft Eg (MSG) c/ Les Gravières rhénanes SARL : Rec. P.I-911) v. Ég. Cass. com., 29 oct. 1985 : Bull. civ. IV, no 254).

 

L’article 17 de la Convention ayant pour objet de prévoir lui-même les conditions de forme que doivent réunir les clauses attributives de compétence, les États contractants n’ont pas la liberté de prescrire d’autres exigences de forme que celles prévues par la Convention. Appliqué au domaine de la langue à utiliser dans la convention attributive de compétence, ce régime implique qu’une législation d’un État contractant ne saurait faire obstacle à la validité d’une telle convention au seul motif que la langue utilisée n’est pas celle prescrite par cette législation (CJCE 24 juin 1981, Elefanten Schuh GmbH / Jacqmain (150/80, Rec._p._01671) (cf. al. 25-27, disp. 3).

 

 

Civ. 1re, 23 janv. 2008, Bull. Civ. I, n° 17 Attendu que, pour dire le tribunal d’instance de Montpellier compétent, l’arr t attaqué retient que le contrat de vente est rédigé en anglais et qu’il n’est pas démontré que Mme X…, non commerçante, a apprécié la présence de la clause attributive de juridiction, placée   la dernière ligne du contrat et non spécifiée de manière très apparente contrairement aux prescriptions de l’article 48 du nouveau code de procédure civile ;

Qu’en statuant ainsi, alors que les parties étaient, à la date de la convention, domiciliées sur le territoire d’Etats communautaires, que la situation était internationale et que la clause, rédigée par écrit, relative à un rapport de droit déterminé, désignait les tribunaux d’un Etat communautaire, la cour d’appel a ajouté au texte susvisé une condition qu’il ne comporte pas et l’a ainsi violé ;

 

Dans les contrats internationaux de droit privé, les parties choisissent librement la langue dans laquelle elles rédigent leurs accords. S’il est fait exception   ce principe dans les contrats d’assurance des risques français qui, selon l’article L. 112-3, alinéa 1er, du Code des assurances, texte auquel l’article L. 111-2 du m me Code interdit de déroger, doivent  tre rédigés en français, cette loi de police se trouve, par application de l’article L. 111-1 du Code des assurances, écartée dans les assurances maritimes, sauf lorsqu’il s’agit de couvrir les risques de la navigation de plaisance (Com. 11 mars 1997, Bull. Civ. IV, n° 66)

 

2. Acceptation tacite

 

 

L’article 26 dispose que “Outre les cas où  sa compétence résulte d’autres dispositions du présent règlement, le juge d’un État membre devant lequel le défendeur comparaît est compétent. Cette règle n’est pas applicable si la comparution a pour objet de contester la compétence ou s’il existe une autre juridiction exclusivement compétente en vertu de l’article 22″

 

CJUE, 17 mars 2016, C‑175/15, Taser International Inc. Contre SC Gate 4 Business SRL,Cristian Mircea Anastasiu,

 

3. Précisions relatives à la juridiction

 

L’article 25 indique que la prorogation se fait au profit d’un ou de juridictions d’un Etat membre.

 

Il a été jugé que “Les termes « sont convenues », qui figurent   l’article 17, premier alinéa, premi re phrase, de la convention du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l’exécution des décisions en mati re civile et commerciale, ne sauraient  tre interprétés en ce sens qu’ils exigent qu’une clause attributive de juridiction soit formulée de telle façon qu’il soit possible d’identifier la juridiction compétente par son seul libellé.

 

Il suffit que la clause identifie les éléments objectifs sur lesquels les parties se sont mises d’accord pour choisir le tribunal ou les tribunaux auxquels elles entendent soumettre leurs différends nés ou à naître. Ces éléments, qui doivent être suffisamment précis pour permettre au juge saisi de déterminer s’il est compétent, peuvent être concrétisés, le cas échéant, par les circonstances propres à la situation de l’espèce (Arrêt du 9 novembre 2000, Coreck Maritime (C-387/98, Rec._p._I-9337) (cf. point 15, disp. 1)

 

Une clause attributive de juridiction au profit des tribunaux de Hambourg doit  tre appliquée (Civ. 1re, 28 janv. 2009, Bull. Civ. N° 13).

 

CJUE, 7 juill. 2016, Hőszig Kft. Contre Alstom Power Thermal Services, C-222-15,:

 

En ce qui concerne la précision du contenu d’une clause attributive de juridiction, s’agissant de la détermination d’un tribunal ou de tribunaux d’un État membre pour connaître des différends nés ou à naître entre les parties, la Cour a déjà jugé, s’agissant de l’article 17 de la convention de Bruxelles, que les termes de cette disposition ne sauraient être interprétés en ce sens qu’ils exigent qu’une telle clause soit formulée de sorte qu’il soit possible d’identifier la juridiction compétente par son seul libellé. Il est en effet suffisant que la clause identifie les éléments objectifs sur lesquels les parties se sont mises d’accord pour choisir le tribunal ou les tribunaux auxquels elles entendent soumettre leurs différends nés ou à naître. Ces éléments, qui doivent être suffisamment précis pour permettre au juge saisi de déterminer s’il est compétent, peuvent être concrétisés, le cas échéant, par les circonstances propres à la situation de l’espèce (arrêt du 9 novembre 2000, Coreck, C‑387/98, EU:C:2000:606, point 15).

« En l’occurrence, selon les constatations de la juridiction de renvoi, en vertu de la clause attributive de juridiction en cause au principal, « les tribunaux de Paris sont compétents, à titre exclusif et définitif » pour connaître des différends qui naîtraient entre les parties.

Ainsi, si cette clause ne désigne pas explicitement l’État membre dont les parties sont convenues que ses juridictions sont compétentes, les juridictions visées sont celles de la capitale d’un État membre, qui, en l’occurrence, est également celui dont la loi a été désignée par les parties comme applicable au contrat, de sorte qu’il ne fait aucun doute que ladite clause, contenue dans un contrat tel que celui en cause au principal, entend conférer une compétence exclusive aux juridictions relevant du système juridictionnel propre à cet État membre.

Dès lors, il résulte des circonstances propres à la situation de l’espèce, telles que constatées par la juridiction de renvoi, qu’une clause attributive de juridiction, telle que celle en cause au principal, répond aux exigences de précision, rappelées au point 43 du présent arrêt. »

 

 

4. Compétence en cas d’annulation du contrat contenant la clause.

 

 

 

B. Règles particulières

 

En dehors du cas très particulier de la constitution des trusts (v. Art. 23-4 et 5), des règles protectrices ont été instituées en matière d’assurances, de contrats conclus par les consommateurs et de contrats de travail individuel.

 

 

1 Clauses en matière d’assurances

 

Article 15

 

Il ne peut être dérogé aux dispositions de la présente section que par des conventions:

 

1)postérieures à la naissance du différend;

 

2)qui permettent au preneur d’assurance, à l’assuré ou au bénéficiaire de saisir d’autres juridictions que celles indiquées à la présente section;

 

3)qui, passées entre un preneur d’assurance et un assureur ayant, au moment de la conclusion du contrat, leur domicile ou leur résidence habituelle dans un même État membre, ont pour effet, alors même que le fait dommageable se produirait à l’étranger, d’attribuer compétence aux juridictions de cet État membre sauf si la loi de celui-ci interdit de telles conventions;

 

4)conclues par un preneur d’assurance n’ayant pas son domicile dans un État membre, sauf s’il s’agit d’une assurance obligatoire ou qui porte sur un immeuble situé dans un État membre; ou

 

5)qui concernent un contrat d’assurance en tant que celui-ci couvre un ou plusieurs des risques énumérés à l’article 16.

 

Article 16

 

Les risques visés à l’article 15, point 5), sont les suivants:

 

1)tout dommage:

 

a)aux navires de mer, aux installations au large des côtes et en haute mer ou aux aéronefs, causé par des événements survenant en relation avec leur utilisation à des fins commerciales,

 

b)aux marchandises autres que les bagages des passagers, durant un transport réalisé par ces navires ou aéronefs soit en totalité, soit en combinaison avec d’autres modes de transport;

 

2)toute responsabilité, à l’exception de celle des dommages corporels aux passagers ou des dommages à leurs bagages,

 

a)résultant de l’utilisation ou de l’exploitation des navires, installations ou aéronefs, conformément au point 1 a), pour autant que, en ce qui concerne ces derniers, la loi de l’État membre d’immatriculation de l’aéronef n’interdise pas les clauses attributives de compétence pour l’assurance de tels risques;

 

b)du fait de marchandises durant un transport visé au point 1 b);

 

3)toute perte pécuniaire liée à l’utilisation ou à l’exploitation des navires, installations ou aéronefs conformément au point 1 a), notamment celle du fret ou du bénéfice d’affrètement;

 

4)tout risque lié accessoirement à l’un de ceux visés aux points 1) à 3);

 

5)sans préjudice des points 1) à 4), tous les «grands risques» au sens de la directive 2009/138/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 sur l’accès aux activités de l’assurance et de la réassurance et leur exercice (solvabilité II) (14).

 

CJCE, 13 juill. 2007, Assens Havn contre Navigators Management (UK) Limited C‑368/16

CJCE 14 juillet 1983, Gerling Konzern Speziale Kreditversicherung AG e.a. / Amministrazione del Tesoro dello Stato C-201/82

CJCE 14 juillet 1983, Gerling Konzern Speziale Kreditversicherung AG e.a. / Amministrazione del Tesoro dello Stato 201/82.

 

 

2. Contrats conclus par les consommateurs

 

L’article 19 du Règlement limite les clauses attributives en faveur du consommateur.

Article 19

Il ne peut être dérogé aux dispositions de la présente section que par des conventions:

1)
postérieures à la naissance du différend;
2)
qui permettent au consommateur de saisir d’autres juridictions que celles indiquées à la présente section; ou
3)
qui, passées entre le consommateur et son cocontractant ayant, au moment de la conclusion du contrat, leur domicile ou leur résidence habituelle dans un même État membre, attribuent compétence aux juridictions de cet État membre, sauf si la loi de celui-ci interdit de telles conventions.
 

 

3 Contrats individuels de travail

 

Enfin, le salarié est protégé contre les clauses attributives de compétences qui lui seraient défavorables. L’article 23 dispose que :

“Il ne peut être dérogé aux dispositions de la présente section que par des conventions attributives de juridiction:
1) postérieures à la naissance du différend, ou
2) qui permettent au travailleur de saisir d’autres tribunaux que ceux indiqués à la présente section.”

 

 

C. Portée des clauses

 

La convention d’attribution de juridiction est opposable aux assureurs subrogés dans les droits du destinataire des marchandises transportées sans connaissement la comportant (Cass. com., 9 oct. 1984 :  Gaz. Pal. 1984.2, somm. 337 ;  JCP éd. E 1984. 13904).

 

Il en est de même de la clause inscrite dans les statuts d’une société pour les différends opposant celle-ci   ses actionnaires (CJCE, 10 mars 1992 :  Bull. Joly, juill. 1992, no 247).

 

CJCE, 13 juill. 2007, C‑368/16, Assens Havn contre Navigators Management (UK) Limited,

« L’article 13, point 5, du règlement (CE) no 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, considéré conjointement avec l’article 14, point 2, sous a), de ce règlement, doit être interprété en ce sens qu’une victime disposant d’une action directe contre l’assureur de l’auteur du dommage qu’elle a subi n’est pas liée par une clause attributive de juridiction conclue entre cet assureur et cet auteur.

 

 

Si la convention attributive n’a été stipulée qu’une faveur de l’une des parties, celle-ci conserve le droit de saisir tout autre tribunal compétent en vertu de la Convention ».

 

« L’article 17 de la convention du 27 septembre 1968 consacrant le principe de l’autonomie de la volonté, il y a lieu d’interpréter son alinéa 3 de mani re   respecter la volonté commune des parties lors de la conclusion du contrat. Il faut dès lors, pour que l’on puisse parler d’une convention attributive de juridiction n’ayant été « stipulée qu’en faveur de l’une des parties », que la volonté commune d’avantager l’une des parties ressorte clairement, soit des termes de la clause, soit de l’ensemble des indices relevés dans le contrat ou des circonstances qui ont entouré la conclusion de celui-ci.

Une convention attributive de juridiction ne doit pas être considérée comme relevant de l’article 17, alinéa 3, de la convention lorsqu’il est simplement établi que les parties ont convenu de la compétence d’un Tribunal ou des tribunaux d’un État contractant sur le territoire duquel cette partie à son domicile » (Arrêt du 24 juin 1986, Anterist / Credit lyonnais (22/85, Rec._p._01951) (cf. al. 14, 17))

 

Par ailleurs, la pluralité de défendeurs  n’a pas pour effet d’étendre à des parties qui ne l’ont pas souscrite la clause attributive de compétence (Cass. 1re civ., 5 janv. 1999, no 96-19.895, arr t  no 1 P, Compagnie Taisho marine et fire et autres c/ Homont  s qual. et autres : Bull. civ. I, no 5 ; Rev. Lamy droit des affaires, mars 1999, no 899, p. 32).

 

CJUE, 2 octobre 2018, C‑595/17, Apple Sales International, Apple Inc.,Apple retail France EURL contre MJA.

1)      L’article 23 du règlement (CE) no 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, doit être interprété en ce sens que l’application, à l’égard d’une action en dommages et intérêts intentée par un distributeur à l’encontre de son fournisseur sur le fondement de l’article 102 TFUE, d’une clause attributive de juridiction contenue dans le contrat liant les parties n’est pas exclue au seul motif que cette clause ne se réfère pas expressément aux différends relatifs à la responsabilité encourue du fait d’une infraction au droit de la concurrence.

2)      L’article 23 du règlement no 44/2001 doit être interprété en ce sens que l’application d’une clause attributive de juridiction dans le cadre d’une action en dommages et intérêts intentée par un distributeur à l’encontre de son fournisseur sur le fondement de l’article 102 TFUE ne dépend pas du constat préalable d’une infraction au droit de la concurrence par une autorité nationale ou européenne.

 

CJUE, 8 mars 2018, Saey Home & Garden NV/SA contre Lusavouga-Máquinas e Acessórios Industriais SA, C‑64/17,

1)      L’article 25, paragraphe 1, du règlement (UE) no 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, doit être interprété en ce sens que, sous réserve des vérifications qu’il incombe à la juridiction de renvoi d’effectuer, une clause attributive de juridiction, telle que celle en cause au principal, stipulée dans des conditions générales de vente mentionnées dans des factures émises par l’une des parties contractantes, ne satisfait pas aux exigences de cette disposition.

 

2)      L’article 7, point 1, du règlement no 1215/2012 doit être interprété en ce sens que la juridiction compétente, en vertu de cette disposition, pour connaître d’une demande indemnitaire relative à la résiliation d’un contrat de concession commerciale, conclu entre deux sociétés établies et opérant dans deux États membres différents, pour la commercialisation de produits sur le marché national d’un troisième État membre, sur le territoire duquel aucune de ces sociétés ne dispose de succursale ou d’établissement, est celle de l’État membre où se trouve le lieu de la fourniture principale des services, tel qu’il découle des dispositions du contrat ainsi que, à défaut de telles dispositions, de l’exécution effective de ce contrat et, en cas d’impossibilité de le déterminer sur cette base, celui du domicile du prestataire.